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Chemin de la connaissance / L’art et l’anthropologie (5)

Transcription, par Taos Aït Si Slimane, de l’émission, du 22 juin 2007, Les chemins de la connaissance par Jacques Munier, « L’art et l’anthropologie (5) : Les bergers d’Arcadie » avec Michael Zimmermann.

Présentation sur le site de l’émission : Le musée du quai Branly, l’Institut national d’histoire de l’art et le Comité français d’histoire de l’art organisent à Paris les 21, 22 et 23 juin 2007 le colloque international « Histoire de l’art et anthropologie ». Cette manifestation s’inscrit dans le prolongement du colloque de Los Angeles, « Past perfected » (avril 2006), et précède le grand congrès de Melbourne « Crossing cultures, Conflict, Convergence, Migration » (2008). L’Institut national d’histoire de l’art et le musée du quai Branly accueilleront les débats. À cette occasion, les Chemins reviennent sur les rapports et la rencontre fructueuse entre ces deux disciplines.

La totalité de cette série est transcrite et est disponible sur ce site, voir liens ci-dessous :

- « L’art et l’anthropologie (5) : Les bergers d’Arcadie » avec Michael Zimmermann

- « L’art et l’anthropologie (4) : l’échange des symboles » avec Pierre Déléage

- « L’art et l’anthropologie (3) : Collectionneurs et artistes » avec Sally Price

- « L’art et l’anthropologie (2) : Le système des objets avec Pierre Lemonnier »

- « L’art et l’anthropologie (1) : Ouverture avec Anne-Christine Taylor et Thierry Dufrène »

Jacques Munier : « Les bergers d’Arcadie » avec Michael Zimmermann, professeur d’histoire de l’art à l’université d’Eichstätt-Ingolstadt, en Bavière. C’est ça ?

Michael Zimmermann : Oui, merci Monsieur Munier.

Jacques Munier : Michal Zimmermann, j’ai dit que vous êtes historien de l’art, nous avons ouvert cette série avec Thierry Dufrêne notamment, qui est lui aussi historien de l’art contemporain, et vous, Michal Zimmermann. Dans cette contribution que vous apportez à cette réflexion collective sur les relations entre l’histoire de l’art et l’anthropologie vous avez choisi de questionner l’imaginaire de l’anthropologue en montrant ensuite, dans un deuxième temps, le poids de ces représentations concernant la nature, l’altérité de l’autre, le sauvage, le bon sauvage éventuellement, dans les jugements esthétiques et les catégories de l’histoire de l’art. Mais vous souhaitiez commencer par évoquer l’historique de ces relations contrastées, on va dire, entre ces deux disciplines.

Michael Zimmermann : Évidemment, la question est la méthodologie anthropologique en histoire de l’art est à l’ordre du jour, et ceci pour des raisons assez différentes. Il y a d’un côté la globalisation des systèmes d’information, peut être plus que des cultures, il y a une situation dans laquelle la dialectique du soi et des autres, d’identité et d’altérité, change beaucoup, si elle n’est pas complètement périmée. Et de l’autre, on est dans un régime des médias, dans lesquels la différence entre le réel et le virtuel semble s’effacer, dans lesquels la réalité produite par l’imaginaire mes semble devenir aussi importante que les conflits politiques de classe, etc., que l’on a discuté naguère. Pour cette double raison, la question de l’humain, après que les catégories telles que : la tradition, l’œuvre originale, le génie, ont été massivement mises en question, est tout à fait à l’ordre du jour. Si vous me le permettez, je peux dire que le colloque du musée du quai Branly a été précédé par une école internationale de printemps que l’on a organisé, cette année, en Bavière, à Eichstätt et à Munich. Il y en a eu d’autres, on organisait cela depuis cinq ans, et c’était un événement aussi sur la question anthropologique, sur les défis que les anthropologies posent à l’histoire de l’art, dans un atelier de recherche où des jeunes doctorants, et même des magistrants, ont proposé leur recherche en cours.

Jacques Munier : C’est d’ailleurs un petit peu ce que vous allez faire, Michal Zimmermann, au cours de ce colloque, c’est-à-dire que vous n’intervenez pas comme un conférencier mais comme un animateur d’atelier d’échanges entre de jeunes doctorants et des spécialistes soit de l’histoire de l’art soit de l’anthropologie.

Michael Zimmermann : Oui, c’est ça la formule d’un réseau international de l’histoire de l’art que l’on a formé il y a six ans et qui commencent à vraiment se développer très bien et à soutenir les débats européens. Donc, sur cette base, on a aussi confronté deux situations en Allemagne : un accent très intéressant et très discuté par les historiens de l’art, surtout les médiévistes, c’est une anthropologie de notre propre culture, Hans Belting discute l’image religieuse, l’icône, dans un triangle disons méthodologique, dans lequel l’image est accompagnée par le corps, est considéré comme une incorporation de ce qu’il représente, donc l’image, considérée ensemble avec le corps, est le médium. En Allemagne, Gerd Wolff qui nous montre une mythologie de l’image, pas seulement la ( ? manque un mot) mais aussi le voile, qui à la fois thématise l’image et le transporte dans l’image lui-même, ou des mythes tel Narcisse, le regard de la Méduse, etc., dans lesquels les cultures ont toujours négocié l’image dans une philosophie peinte de l’image dans l’image. C’était donc la contribution, disons, du débat récent en Allemagne. Une collègue Canadienne a dit : C’est pour Gerd Wolff qu’on recommence à lire des livres sur l’art du Moyen-âge. De l’autre côté, avec une année du musée du quai Branly, on est face à une situation où ce musée sans nom, qui est appelé selon le quai où il est situé…

Jacques Munier : Oui, une dénomination géographique qui permet d’évacuer au moins pour ce nom justement toutes les questions, dont celles que nous avons évoquées tout au long de la semaine, qui concernent ce statut des objets de l’« art premier », si j’ose m’exprimer ainsi.

Michael Zimmermann : On s’est tellement habitué à utiliser tous ces mots : « pimitivisme », « arts premiers », entre virgulettes, cela montre à quel degré cette dialectique de nous et des autres semble être complètement périmée d’un côté mais de l’autre le répertoire culturel de nous-mêmes sur les états idéaux de la nature, sur des âges d’o