Étienne Klein : La conversation scientifique par Étienne Klein. Aujourd’hui « Comment se porte la culture (scientifique) ? » Cela ne s’entend pas à la radio mais dans cette question que je pose « Comment se porte la culture (scientifique) ? », le mot scientifique est mis entre parenthèses, comme pour laisser ouverte la question de savoir si la science fait ou non, doit ou non, faire partie de la culture tout court. Certains parlent d’un illettrisme scientifique, qui gagnerait nos sociétés, celles qu’on qualifie à tort ou à raison de postmodernes. Quelques signes portent à le penser, mais nul d’entre eux ne vaut démonstration. Le premier de ces signes tient au fait que tous ceux qui écrivent des livres de sciences, destinés à un public large, savent que les éditeurs se montrent de plus en plus insistants sur un point : le niveau de ce que l’on écrit ne doit pas être trop élevé, et le moins de choses possibles doivent être supposées connues du lecteur. Mais cette demande qui est nette relève d’une motivation qui, elle, l’est moins. Faut-il la mettre sur le compte d’un louable souci démocratique, celui de toucher le plus grand nombre de personnes ? Ou, avère-t-elle plutôt qu’il existerait effectivement une croissance de l’illettrisme scientifique ? Quoiqu’il en soit, on ne saurait se montrer aussi sévère qu’Albert Einstein expliquant que « Ceux qui utilisent négligemment les miracles de la science en ne les comprenant pas plus qu’une vache ne comprend la botanique des plantes qu’elle broute avec plaisir devraient tous avoir honte. » Le père de la relativité se montre là beaucoup trop exigeant, en plus d’être injuste avec les ruminants, qui savent sans doute deux ou trois choses sur la vie des herbes qu’ils mâchouillent sans se lasser, à une cadence d’essuie-glace. Il est en effet devenu impossible de se faire une bonne culture à la fois sur la physique des particules, les ondes gravitationnelles, la génétique, le nucléaire, la climatologie ou l’immunologie, de sorte que si on voulait que les citoyens participent aux affaires publiques, en étant vraiment éclairés sur tous les sujets, il faudrait que chacun ait le cerveau de mille Einstein, chose qu’Einstein lui-même ne possédait pas puisqu’il en avait qu’un seul, qui plus est, normal. Comment améliorer la situation ? Pour en discuter, je n’y suis pas allé par quatre chemins, j’ai pris mon ordinateur et j’ai adressé, par mail, une invitation à Bruno Maquart, président d’Universcience, il m’a répondu aussitôt oui, ce qui a pour conséquence présente, il est en face de moi.
Bonjour Bruno Maquart !
Bruno Maquart : Bonjour Étienne Klein.
Étienne Klein : Vous êtes ingénieur agronome, scientifiques donc, et vous êtes aussi énarque.
Bruno Maquart : Je ne suis pas énarque, je suis un ancien élève de l’ÉNA, ce qui n’est pas exactement la même chose.
Étienne Klein : Je comprends la nuance. Je crois que vous êtes le seul ancien élève de l’ÉNA invité à cette émission, j’en suis très heureux. J’aimerais, pour commencer, que vous nous expliquiez comment on peut passer de l’obtention d’un diplôme d’ingénieur agronome à l’École nationale d’administration. Qu’est-ce qu’il fait la transition ?
Bruno Maquart : Ce qui fait la transition, c’est de se retrouver, à 21-22 ans, à faire son service militaire à New Delhi, en Inde, à l’ambassade, comme attaché agricole. Un an ailleurs. Un an pendant lequel vous avez du temps pour penser. Et c’est le bon moment pour réfléchir à ce que vous voulez faire. Je m’étais toujours posé la question de savoir si je devais ou pas faire l’ENA, parce que je voulais travailler pour la chose publique, pour dire les choses assez simplement. Puis, ma conviction s’est forgée au fil des semaines et des mois à New Delhi. Quand je suis rentré, je dis : « Bon, je vais y aller », c’est comme ça que cela s’est passé, et j’ai eu la chance d’y arriver. Je ne suis pas le seul, on est quelques-uns on se connaît d’ailleurs, puisqu’on est quelques originaux qui ont une formation double. L’intérêt de la formation d’AgroParisTech, c’est comme ça que cela s’appelle aujourd’hui, c’est une formation extrêmement pluridisciplinaire en fait, qui prépare beaucoup à faire d’autres choses, à comprendre le monde, puis finalement à suivre une voie qui est la sienne.
Étienne Klein : Vous êtes aujourd’hui, Bruno Maquart, président d’Universcience, on sent que la question de la culture scientifique vous intéresse, c’est une question qui n’est pas simple, qu’est-ce qui a fait que vous avez, là encore, franchi le pas d’y aller ? Est-ce un goût personnel ou est-ce que c’est parce que vous avez le sentiment qu’elle a un défi public, politique presque à relever ?
Bruno Maquart : Il y a même une question démocratique, citoyenne. La science est partout autour de nous, mais elle n’est pas suffisamment dans le débat public, et dans le monde culturel elle occupe une place à part, singulière, peut-être un peu trop à l’ombre. Je pense qu’il nous revient aujourd’hui de profondément transformer les modes d’adresse au public, et de faire en sorte que la science reste le sujet autour duquel s’ordonne la décision publique, les choix collectifs, puis la vie de chacun finalement.
Étienne Klein : Est-ce que vous comprenez d’où vient que la science aujourd’hui, bien qu’elle change la vie de chacun, par son halo technologique, soit presque en lévitation intellectuelle dans le monde politique ? Elle est trop peu souvent évoquée, on parle la recherche, mais pas des résultats de la science elle-même. On voit que la campagne présidentielle commence, et je n’ai pas entendu qu’elle soit vraiment abordée. Est-ce que vous expliquez cette sorte de schizophrénie d’une science qui agit dans la vie des gens, plus que beaucoup de lois qui sont votées au Parlement, mais qui n’est pas l’objet de réflexion, de discours de la part du personnel politique ?
Bruno Maquart : Je dirais que la science a besoin de grandes voix, de grandes voix nationales, de grandes voix européennes, de grandes voix mondiales, et la science a aussi besoin que des scientifiques s’engagent dans la vie publique, individuellement, collectivement. Quand les prix Nobel interpellent les pouvoirs publics, par exemple sur les montants des crédits de la recherche, c’est une manière de servir la science évidemment. On constate aujourd’hui que le personnel politique compte peu de scientifiques dans ses rangs. C’est un état de faits. Si j’ai juste une suggestion à faire aux scientifiques, c’est : « Engagez-vous en politique. Faites-vous élire maire. Faites-vous élire Conseiller régional. Faites-vous élire député. », c’est le meilleur …
Étienne Klein : Vu que les politiques ne parlent pas de science, les scientifiques devraient s’engager en politique ?
Bruno Maquart : Les politiques, ce ne sont jamais qu’une expression de nous-mêmes, c’est un miroir. Les politiques nous tendent un miroir, quand le miroir nous renvoie une image qui nous ne plaît pas, à nous de changer ce que nous sommes pour que l’image soit plus appropriée.
Étienne Klein : Comment est-ce que vous expliquez, vous qui êtes tout près de ces questions aujourd’hui, que lorsqu’on se tente d’organiser des débats publics sur ce qu’on veut faire des technologies, je pense aux nanosciences, d’autres sujets de ce type, comme la biologie synthèse, ça provoque une sorte de curieux mélange de conflits très violents et d’indifférence massive ? Il y a des gens qui sont très engagés, pour ou contre, et le public qui reste à distance en manifestant un intérêt qui peut être quasi nul.
Bruno Maquart : C’est la grande question de la démocratie aujourd’hui, et de la manière dont on le fait délibéré collectivement une population, une société, qui aujourd’hui, pour des raisons diverses, est d’éclatée. L’information est grande, je pense que chacun se dit, en abordant une question, qu’elle est tellement vaste qu’il n’arrivera pas à l’appréhender complètement. Donc, il faut qu’on cherche, qu’on trouve des méthodes, pour que à rebours de la démagogie nous trouvions les moyens de faire émerger des paroles citoyennes. C’est vrai pour la science et c’est vrai pour beaucoup d’autres choses. C’est vrai dans le secteur de la santé, sur lequel j’ai beaucoup travaillé, et je pense que nous devons nous, on y reviendra j’imagine, institution de culture scientifique ou de diffusion scientifique, travailler à ces questions-là, qui sont majeures pour nous. Nous ne nous sommes plus simplement des dispensateurs de savoir, mais nous sommes aussi des animateurs d’un débat difficile, compliqué, et je vous mentirais en vous disant qu’on a trouvé la réponse, mais on la cherche.
[Sujet inséré] Oh là-là, je n’ai jamais rien compris aux maths et physique, mais si on m’avait emmenée au Palais de la Découverte quand j’étais petite, peut-être j’aurais compris que ces matières peuvent être intéressantes et ludiques.
Étienne Klein : Je reviens maintenant à votre fonction d’aujourd’hui, Bruno Maquart, vous êtes président d’Universcience, vous êtes saturé d’anniversaires en ce moment, 30 ans de la Cité des Sciences et 80 ans pour le Palais de la Découverte, qui fait partie d’Universcience. Comment est-ce que vous avez préparé ces anniversaires ? Quelles sont les manifestations qui vont y être associées ?
Bruno Maquart : Alors, un anniversaire, c’est bien, deux anniversaires, c’est encore mieux, puisque c’est un moyen pour nous, grâce au calendrier, de relier nos deux sites, nos deux maisons, puisque la Cité des sciences et de l’industrie a été ouverte en mars 1986 …
Étienne Klein : Le 13 mars. [1]
Bruno Maquart : Exactement !
Étienne Klein : Il s’est passé autre chose …
Bruno Maquart : Il s’est passé quelque chose dans le ciel.
Étienne Klein : Pour les auditeurs, je précise quand même quoi, parce que je pense que personne ne s’en souvient. C’était le jour de la rencontre de la comète de Halley et de la sonde Giotto.
Bruno Maquart : Européenne.
Étienne Klein : Européenne.
Bruno Maquart : Ce qui n’est pas neutre. Et le Palais de la Découverte, lui, a été ouvert en mai 1937 dans le cadre de l’Exposition Internationale. Donc, on s’est dit qu’on allait pouvoir ouvrir une saison en mars 2016 et la flore en mai 2017, des 30 ans de l’une aux 80 ans de l’autre. Alors, ce double anniversaire, il est à la fois le moyen, l’occasion de réfléchir à ce qu’on a fait, de là où on vient, décrire notre passé, puisque on est en fait assez peu soucieux d’écrire le passé, aussi étrange que cela paraisse, de laisser des traces, en tout cas d’organiser des traces, et d’avoir une réflexion critique sur ce qu’on a fait, pour nous projeter dans l’avenir ; parce que un anniversaire, c’est aussi pour dire : « l’année prochaine je ferai ça … » Nous, ce n’est pas l’année prochaine, c’est dans les 10 ans qui viennent. Cet exercice de projection, nous l’avons évidemment mené collectivement, parce qu’il engage une communauté de travail soudée autour de grandes valeurs. Alors, ce sera l’occasion, c’est déjà l’occasion puisqu’elle a commencé, de lancer de nouveaux formats. On a lancé des événements, qui sont des weekends, par exemple sur les drones [2], que nous avons fait au printemps dernier nous allons également lancer un colloque sur la muséologie scientifique sur deux jours [3], qui permet de faire le point sur de là où on vient et là où on va, et 1000 autres choses, qui prennent des formes variées sur le Net. On fait des sites dédiés, puis je crois surtout que c’est un moyen pour nous, je voyage beaucoup, de dire à l’étranger qu’Universcience ce sont deux établissements aujourd’hui, non plus un seul, et qu’ils apportent, de manière complémentaire, une expertise, une French touch sur la science et qu’elle a de l’intérêt.
Étienne Klein : Vous vous posez la question savoir d’où on vient ? Quand il s’agit du Palais Découverte et de la Cité des sciences, pour le Palais de la Découverte c’est inconnu, il a joué un rôle décisif dans la vocation de beaucoup de scientifiques aujourd’hui, mais l’ambiance a changé quand même. C’est Jean Perrin qui l’a fondé le Palais des Découvertes.
Bruno Maquart : C’est Jean Perrin, un enfant du Front populaire …
Étienne Klein : Prix Nobel de physique, découvre de l’atome en 1907 prix Nobel de physique en 1926, et voilà ce qu’il disait en 1930, c’est un peu avant la création du Palais, c’était au moment de la création de la Caisse nationale des sciences, qui est l’ancêtre du CNRS, je cite Jean Perrin [4] : « … rapidement, peut-être seulement dans quelques décades -, je pense qu’il voulait dire décennies, décade 10 jours, en anglais, c’est plutôt dix ans, mais en français c’est 10 jours - si nous consentons aux légers sacrifices nécessaires, les hommes libérés par la science vivront joyeux et sains, développés jusqu’aux limites que ce que peut donner leur cerveau. Ce sera un Éden qu’il faut situer dans l’avenir au lieu de l’imaginer dans un passé qui fut misérable. » Un sorte d’ode au progrès, qui semble un peu désuet aujourd’hui.
Bruno Maquart : Il s’est passé des choses …
Étienne Klein : Il s’est passé des choses par la suite, mais il s’est de fait déjà passé des choses, comment est-ce que vous arrivez à adapter le Palais de la Découverte, qui va être fermé pendant quelques années pour travaux justement, à partir de 2020 ? Comment est-ce que vous allez adapter la situation actuelle ?
Bruno Maquart : C’est une question essentielle, d’abord une chance pour nous, puisque nous avons la charge et l’honneur de réinventer le Palais de la Découverte, et de trouver les moyens aujourd’hui, tout en étant fidèle aux principes fondateurs, d’avoir un instrument au cœur de Paris, dans un écrin totalement renouvelé, de parler des sciences de manière, je dis repensée. Alors, il ne s’agit pas de tout transformer en salle avec des écrans uniquement, de tout repeindre en blanc, passer tout à la Javel, même si le Palais de la Découverte a le charme de l’ancien, et qu’aujourd’hui les nécessités techniques, évidemment, rendent urgentes des mises aux normes. La rénovation du Palais de la Découverte, c’est des murs mais c’est d’abord et avant tout un projet scientifique, et nous sommes en train de nous organiser pour …
Étienne Klein : Est-ce qu’il y a toujours des démonstrations d’expérience ? Est-ce qu’on peut voir ses cheveux se dresser sur sa tête ?
Bruno Maquart : La réponse est oui !
Étienne Klein : Ah ! À condition d’en avoir ?
Bruno Maquart : Il ne faut pas faire du neuf avec du vieux, mais en tout cas garder ce qui fait l’esprit de cette maison, qui est un esprit très singulier, qui la rend populaire, puisque c’est une maison qui a une notoriété très élevée, que les gens fréquentent beaucoup, en famille, avec l’école, mais il faut qu’on trouve là aussi un moyen de renouveler l’approche. En fait, on a déjà commencé, puisque nous allons ouvrir dès l’année prochaine, presque en avant en première des travaux, une unité sur l’informatique et les sciences du numérique, parce que nous pensons que c’est une discipline, ou un champ disciplinaire, qui est devenu aussi important que la physique en son temps, cher Étienne Klein ! ou la chimie …
Étienne Klein : Sans la remplacer …
Bruno Maquart : Sans la remplacer, évidemment, mais en tout cas de lui donner une place de sciences à part entière, et de parler du monde d’aujourd’hui, comme nous l’avons toujours fait. Alors, les exposés que vous mentionnez, c’est la marque de fabrique de cette maison, c’est une rareté dans le monde d’aujourd’hui, de trouver des gens instruits et dans le métier et de vous inscrire à leur tour. Et cette façon de faire, qui est d’avoir un contact avec une personne, qui vous parle d’un sujet, nous allons évidemment non seulement la préserver mais lui donner encore plus de vigueur, parce que ça fait du Palais de la Découverte un endroit où vous pouvez poser des questions et obtenir des réponses. Et ça, dans le monde dans lequel on vit aujourd’hui, dans le monde culturel en général, c’est assez rare. Quand vous sortez d’un musée, la plupart du temps vous avez des questions et puis c’est à vous de trouver les réponses sur Internet, en allant en bibliothèque, en interrogeant des amis ou des proches. Là, nous entretenons un dialogue direct avec nos visiteurs, que ce soit des gamins, s’ils sont à l’école, ou bien un adulte, qui connaît le sujet ou pas du tout. L’intérêt du médiateur, comment on l’appelle, c’est qu’il calibre son discours sur les gens qu’il a en face de lui.
Étienne Klein : La mission d’Universcience c’est une mission impressionnante. Cette mission, c’est : « De diffuser, je cite, la culture technique et industrielles auprès de tous les publics quel que soit leur âge, leur niveau de formation, leur origine géographique ou sociale. » Vaste programme !
Bruno Maquart : Vaste programme. C’est une institution universelle, c’est bien pour ça qu’elle est française, j’allais dire, elle est universelle, parce qu’elle s’adresse à tous. Elle s’adresse aux sachants comme au non-sachants, quel que soit son origine sociale et géographique, et il y a des gens qui sont éloignés de la culture en général et la culture scientifique en particulier …
Étienne Klein : Est-ce que vous les avez identifiés ? Est-ce que vous avez des classes d’âge ? …
Bruno Maquart : Oui, on les a identifiés. En fait, j’allais dire malheureusement, c’est le sujet de l’ensemble des institutions culturelles depuis 30 ans, ce n’est pas le sujet d’Universcience depuis que je suis arrivé, mais depuis 30 ans le secteur culturel, pris en son entier, cherche à aller au-devant de ceux dont le niveau d’appétence pour nos sujets est faible. On les trouve essentiellement dans les populations les moins qualifiées, parce qu’il y a une coloration très forte entre la fréquentation des lieux culturels et les niveaux socioculturels. On a la chance nous, à Universcience, de manier des objets, l’assurance, l’innovation, les techniques, qui souffrent moins de barrières sociales. Quand vous allez au Louvre vous regardez un tableau mythologique, soit vous voyez des gens à moitié nus qui se prélassent ou bien qui se battent, il faut qu’on vous explique qui ils sont, ce qu’ils représentent et pourquoi on les a peints. Il y a moins de barrières sur nos sujets, la science rend les gens plus égaux …
Étienne Klein : Il peut y avoir la barrière de l’abstraction pour certaines sciences, il peut y avoir la barrière du vocabulaire …
Bruno Maquart : Il peut y avoir des barrières de l’abstraction, du vocabulaire, je ne dis pas que la science est un sujet facile et proche d’emblée, mais ça c’est notre métier. Nous, on est un peu le troisième homme, entre le chercheur et le citoyen, il y a …
Étienne Klein : Il y a le médiateur …
[Insert musique]
Étienne Klein : Bruno Maquart, vous parlez de différentes sortes de publics, qui se distinguent par leur niveau de formation, en quelque sorte, mais est-ce qu’il y a des effets d’âge aussi ? Est-ce que les jeunes adultes viennent aussi facilement que les personnes âgées ou que les enfants, qui sont amenés par les écoles, par exemple ?
Bruno Maquart : Il y a un double effet d’âge, et on a deux zones de progrès, on va dire comme ça. Les 15-25 ans ou 15-30 ans, peu importe, disons les jeunes adultes ou les vieux adolescents. Ils viennent en moyenne peu dans nos établissements, et quand ils viennent chez nous ils viennent pour y faire des choses assez spécifiques. Nous organisons des Master-classes sur les jeux vidéo, qui attirent ce public-là, et c’est ce qui motive le projet que nous avons d’ici un an, d’ouvrir un espace permanent sur le jeu vidéo au sein de la Cité des Sciences et de l’Industrie, qui est un peu le pendant de ce que nous faisons au Palais de la Découverte, avec l’unité informatique et les sciences du numérique. Donc, un espace dans lequel il y aura à voir, mais aussi à faire, parce que il y a un peu de trois âges, ou trois façons de faire pour parler des sciences au grand public. Il y a la façon à laquelle on a été habitué quand on était enfant, qui était voir – regarder, sans y mettre les mains.
Étienne Klein : Écouter.
Bruno Maquart : Écouter. Ma mère me disait : « Tu touches avec les yeux » ça, ça m’a toujours frappé. Il fallait mettre les mains derrière le dos, parce qu’il fallait surtout ne toucher à rien, c’est le cas dans de nombreuses établissements culturels. Puis, il y a une deuxième manière de faire, qui est de toucher. C’est justement ce que la Cité des sciences, et les Centres de sciences en général, nous ne sommes pas seuls à le faire évidemment, ont inventé. Non seulement il n’est pas interdit de toucher, mais il est recommandé de toucher, c’est avec la main qu’on va vous conduire à appréhender, comprendre, expérimenter, vous interroger.
Étienne Klein : On ne viendra, mais parmi les axes de votre programme, il y en a un qui s’intitule « les mains dans le cambouis. »
Bruno Maquart : Tout à fait.
Étienne Klein : C’est de ça dont vous parlez en fait.
Bruno Maquart : Presque. Troisième dimension de la démonstration des sciences, c’est le faire. C’est aujourd’hui très important d’amener les gens à faire avec nous, parce que c’est aussi un moyen d’apprentissage, et au-delà de ce que je disais sur les jeux vidéo, nous avons créé un Fab Lab, une espèce d’atelier du bricolage du 21e siècle, ouvert à tous, ceux qui codent, ceux qui ne codent pas, dans lequel on trouve des découpeuses lasers, des imprimantes 3D, …, et qui sont les endroits où l’appropriation des techniques se fait par le geste et par la création accompagnée ou non.
Étienne Klein : Les gens peuvent venir ?
Bruno Maquart : Ils peuvent venir.
Étienne Klein : Ils ont accès aux instruments ?
Bruno Maquart : Ils ont accès à des machines, à des savoir-faire, à des gens, des médiateurs, mais ils ont aussi accès à d’autres …
Étienne Klein : Ils sont encadrés …
Bruno Maquart : Ou pas.
Étienne Klein : Est-ce qu’il y a de la casse ?
Bruno Maquart : Non, parce que ce sont finalement des machines qui sont robustes, et on n’est pas 50 personnes autour d’une découpeuse laser. De toute façon les gens sont très encadrés quand ils ont accès à ce genre de bêtes. Ce qui est très intéressant, c’est que ce sont des lieux où les gens se rencontrent, parce que nous sommes aussi des lieux où il est bon de ne rien faire, où il est bon de rencontrer d’autres gens, où il est bon que l’esprit vagabonde. Nous devons être des lieux de vagabondage plaisant, et nous entendons être des Agoras, les places de village. Cela s’appelle la Cité, la Villette, ce n’est pas pour rien. Dans une cité, il y a des places, il y a des quartiers, il y a des immeubles ; et nous voulons être un lieu où les gens peuvent se rencontrer, soit qu’ils viennent en communauté prédéfinie, soit que des communautés se constituent grâce à nous. En fait, nous nous sommes des pourvoyeurs de ressources cognitives, techniques, mais aussi sociales. Nous offrons des environnements …
Étienne Klein : D’expérimentation sociale, localement ?
Bruno Maquart : Oui … En tout cas, on veut être un lieu dans lequel les gens puissent inventer leur devenir individuel ou collectif, expérimenter des choses, venir échanger avec d’autres. Tout cela est en train de bouger assez vite finalement, ce qu’on appelle les tiers-lieux, d’un mot un peu pompeux, mais qu’on voit se développer un peu partout. Le Fab Lab va devenir un équipement j’allais dire standard. Le Centre Pompidou, un établissement cher à mon cœur, ouvre un Fab Lab pour les 9-12 ans, c’est un moyen d’attirer les jeunes, la génération Y, les bidouilleurs et les non bidouilleurs, à nos sujets et dans nos établissements.
Étienne Klein : Là, vous parlez de la première tranche d’âge, qui, pour ce qui est des institutions culturelles, manifestent assez peu d’appétence. Il y avait une deuxième, je crois.
Bruno Maquart : La deuxième, c’est les seniors, parce qu’à la Cité des sciences et de l’industrie est gigantesque, comme vous le savez, c’est 4 fois la taille du Centre Pompidou, c’est un gigantesque bâtiment …
Étienne Klein : Il faut beaucoup marcher …
Bruno Maquart : Le bâtiment intimide un peu. Autant le Palais de la Découverte vous y rencontrez beaucoup de grands-parents avec leurs petits-enfants, c’est très joyeux, autant la Cité des Sciences et de l’Industrie, on a moins de seniors, parce que je pense que le lieu est un lieu un peu intimidant pour ceux qui ont l’âge d’être retraités.
Étienne Klein : Alors, comment est-ce que vous allez faire ? Vous mettez des sièges ?
Bruno Maquart : L’attention aux autres, cela commence par ça, donner des sièges, de faire attention à ce que les choses soient compréhensibles de tous. On a une tradition d’ouverture à tous ceux qui, par le hasard de la vie, ou par les malheurs de la vie souffrent d’un handicap, on va dire d’accessibilité. La maison à une très forte tradition, nous traduisons en braille tout ce que nous faisons, nous avons beaucoup de choses pour les personnes malentendantes, et l’accessibilité universelle, cela veut dire qu’il faut que tout le monde puisse avoir accès à tout, dans les mêmes conditions. Écrire un peu plus gros les cartels, par exemple, ça permet à tout le monde, y compris aux gens dont la vue baisse, on commence à rentrer dans cette catégorie d’âge, ma foi d’avoir un niveau de confort plus important. Cela passe aussi par le développement d’une offre plus spécifique, et par le traitement de thématiques qui intéressent aussi les personnes âgées.
Étienne Klein : Pour qu’on fixe un peu les ordres de grandeurs, il y a combien de visiteurs par année, soit au Palais, soit à la Cité des Sciences ?
Bruno Maquart : Bon an mal an, sachant que l’année dernière …
Étienne Klein : Vous avez de grosses fluctuations ?
Bruno Maquart : Il y a des fluctuations, d’abord parce que les fluctuations dépendent de facteurs internes, un succès ou pas de la programmation. Cette année, au Palais de la Découverte, on a montré une exposition sur les dinosaures, nous avons connu une fréquentation en haut de 50%, heureusement que les dinosaures sont là. Et, il y a des facteurs exogènes, comme malheureusement les attentats qui ont frappé Paris l’année dernière, à deux reprises, effet redoublé pour nous par l’incendie qui nous a frappé au moins d’août 2015 …
Étienne Klein : Au moment où vous avez pris vos fonctions.
Bruno Maquart : Quelques semaines après. C’était une entrée en matière assez « originale », du coup on va produire une exposition sur le feu [5], pour la saison 2017-18, parce que c’est un beau sujet, un bel objet, un beau phénomène scientifique, autour duquel on peut faire beaucoup de choses.
Étienne Klein : C’est l’incendie qui vous a donné l’idée ?
Bruno Maquart : Exactement, j’ai sorti ça un peu comme une boutade, pour dire tiens on devrait faire une exposition, et les équipes sont revenues au bout de quelques semaines en me disant : « Le sujet est très intéressant, si vous persistez, on propose de le traiter » Du coup, il est inscrit à la programmation, une exposition sur le feu.
La fréquentation, les eaux moyennes, c’est aux alentours de 3 millions de personnes. Un peu moins cette année, l’année dernière, c’était un peu plus, en 2014, mais grosso modo j’allais dire, la jauge habituelle, c’est 500 000 personnes au Palais de la Découverte, et 2,5 millions à la Cité des Sciences et de l’Industrie, ce qui fait de nous …
Étienne Klein : C’est des publics qui se recouvrent ? Ceux qui vont à la Cité vont au Palais, et réciproquement ?
Bruno Maquart : Pour partie. De toute façon, dans les 2,5 millions de la Cité, il y a des gens qui reviennent plusieurs fois. Nous avons des équipements variés, puisqu’on a une bibliothèque publique, c’est la troisième bibliothèque publique de France …
Étienne Klein : Avec 3 millions d’ouvrages …
Bruno Maquart : C’était un fonds gigantesque, elle est en pleine transformation, parce que le numérique est évidemment pose des questions au monde des bibliothèques assez redoutables, qu’on a décidé de prendre à bras le corps. La bibliothèque est dans une phase de chrysalide et le papillon va bientôt sortir.
Étienne Klein : Je parlais tout à l’heure des axes de la programmation, peut-être qu’on peut y revenir et les détailler un petit peu. Le premier, si j’ai bien compris le document, c’est « La science toute une histoire ». Il s’agit de raconter des histoires de découvertes, pour que chacun ait une meilleure connaissance de ses connaissances. On sait tous que la Terre est ronde, mais on ne sait pas forcément comme on a su qu’elle était ronde.
Bruno Maquart : C’est exactement cela, parce qu’il n’y a pas de linéarité dans le travail créatif scientifique, il faut montrer que la science est une œuvre humaine, qui comporte toutes les caractéristiques, et qu’elle permet aussi de raconter l’histoire du monde. La science n’est pas un objet posé sur une étagère à part, elle est au centre de nos sociétés, elles en expriment le génie un moment donné, elles racontent son histoire économique, elles racontent son histoire culturelle, son histoire sociale, son histoire religieuse, et qu’il est important d’éclairer cette arrière-plan, parce que nous avons la conviction que pour parler d’aujourd’hui, il faut parler d’hier, ou pour parler demain, il faut parler d’hier.
Étienne Klein : Donc, cela va être des thèmes spécifiques, j’imagine.
Bruno Maquart : Nous avons en matière d’exposition, organisé il y a quelques années une exposition sur Léonard de Vinci [6], nous venons de fermer une exposition sur Darwin et l’évolution [7], et nous allons programmer une exposition sur Pasteur [8]. Pasteur est un scientifique original à plusieurs points de vue. Il nous permet de parler du XIXe siècle, c’est l’un des deux génies, avec Victor Hugo. Il nous permet aussi de parler de beaucoup de choses, la manière dont la science se fait, les rapports entre la science et l’industrie …
Étienne Klein : C’est toujours centré sur un personnage, un génie, comme vous dites ?
Bruno Maquart : On raconte une histoire. Je pense que la science doit aussi s’incarner - je le disais tout à l’heure en parlant de politique – en des personnages. Il ne s’agit pas de faire une galerie des portraits où n’émergeraient que quelques grands hommes ou grandes femmes, pas assez de femme d’ailleurs, mais il s’agit de donner à comprendre l’histoire des découvertes scientifiques.
Étienne Klein : Le deuxième axe, si j’ai compris aussi bien que pour le premier, c’est « Attention science fraîche », comme il est de la peinture fraîche.
Bruno Maquart : Exactement !
Étienne Klein : L’attention veut dire quoi ? Cela veut dire qu’il faut prendre ces savoirs avec prudence, qu’ils ne sont pas tout à fait constitués ?
Bruno Maquart : Cela veut dire qu’il y a quelque chose à voir : « Attention, mesdames et messieurs … », c’est cela que ça veut dire.
Étienne Klein : C’est un appel à la curiosité ?
Bruno Maquart : C’est un appel à la curiosité. Il se passe des choses à cet endroit-là, qui sont toutes récentes, et nos maisons ont pour fonction, dans le bruit de l’actualité scientifique, de dégager ce qui présente un intérêt. Et ça, on ne le fait pas tout seul, ce n’est pas les équipes d’Universcience qui en décident toutes seules, mais c’est grâce à nos liens étroits avec la communauté scientifique que nous sommes à même de traiter des sujets, quand nous jugeons, conseillés par le monde scientifique, qu’il est temps d’en parler.
Étienne Klein : Les organismes scientifiques sont représentés dans le Conseil scientifique, j’imagine. Comment ça marche ?
Bruno Maquart : Nous avons mis au point, de manière assez empirique, une méthode de travail assez passionnante, qui consiste pour chaque exposition, à regrouper un petit nombre, une dizaine de scientifiques français et étrangers, des disciplines différentes, d’organismes et de rattachement institutionnel variés, qui nous aident à formuler notre propos, et qui sont les garants de son exactitude scientifique, parce qu’évidemment notre capital symbolique est lié à la rectitude absolue de ce que nous disons, de ce que nous faisons, et de ce que nous émettons. Mais, au-delà de ça, nous sommes en train de réfléchir - j’ai eu une longue conversation avec Alain Fuchs [9] sur le sujet - à mieux organiser ce travail entre les organismes de rechercher et nous, pour traiter du mieux possible l’actualité scientifique. Ceci étant dit, beaucoup de nos salariés ont des contacts quotidiens avec la recherche. En fait, les choses viennent, j’allais dire assez spontanément, il faut que par capillarité nous soyons totalement en prise avec le milieu, mais on a quelques grands partenaires : le CEA, bien évidemment, l’INSERM, l’INRIA, l’INRAP, le CNRS, l’IRD … Les grands organismes de recherche sont évidemment nos partenaires, et je souhaite que ce soit leur maison.
Étienne Klein : Un autre axe, me semble très important : « Les mains dans le cambouis », et vous dites que le pays de Gustave Eiffel doit autant à ses ingénieurs qu’à ses savants.
Bruno Maquart : Oui, c’est une manière de …
Étienne Klein : Gustave Eiffel qui n’avait pas eu son diplôme, je crois. Il l’a eu par la suite.
Bruno Maquart : Le monde est plein de gens qui, Dieu soit loué, ont réussi à exprimer leur génie, même s’ils n’ont pas de fortune université ou académique au départ. Mais, c’est un élément important, constitutif de la Cité des Sciences et de l’Industrie, qui permet d’illustrer aussi les grandes réalisations de la science appliquées dans le monde de tous les jours, et nous tenons beaucoup à cette dimension. Les sciences de l’ingénieur méritent qu’on les montre …
Étienne Klein : Vous pensez qu’elles sont moins précieuses que les sciences fondamentales ?
Bruno Maquart : Je ne sais pas, si elles sont moins prestigieuses, en tout cas elles doivent être traitées, j’allais dire, au même rang que les sciences fondamentales.
Étienne Klein : Ensuite, « Les mutations de notre monde : société sciences », c’est comme ça que vous appelez …
Bruno Maquart : C’est comme ça qu’on l’appelle. On a cherché pendant des semaines une manière de le dire, c’est ce à quoi on est arrivé. C’est une des marques de fabrique de la Cité des Sciences et de l’Industrie, que de s’intéresser aux relations entre sciences techniques innovation et société, l’idée est de pousser assez loin les limites de notre engagement, puisqu’on a en ce moment une exposition sur la Santé mentale, on en aura une sur le Big Data [10], l’année prochaine, on en a une sur les Mutations urbaines aujourd’hui [11]. Donc, parler de la société, parler du monde qui nous entoure, évidemment à chaque fois convoquer la science et la technique, mais là, en prenant le parti de parler de la société et des grandes questions qui nous agitent. De toute façon, les grandes questions scientifiques sont des questions sociales, et les questions sociales sont des questions scientifiques.
Étienne Klein : Donc, vous réjouissez à la façon dont les innovations sont acceptées, mal acceptées, la dimension politique des questions qui tournent autour des applications de la science, est traitée là.
Bruno Maquart : Par exemple, Mutation urbaine, une exposition qui dit que ces méga-systèmes que sont devenus les villes aujourd’hui, sont en fait des systèmes muent par des décisions citoyennes, que la ville est à nous, que la ville, c’est nous qui la faisons, qu’il ne faut pas penser que nous sommes dépossédés du devenir de notre environnement, quand on vit en ville, par d’autres ; il y a la place pour une action citoyenne, et nous le montrons par la preuve. Nous avons fait un tour du monde et nous avons apporté à Paris de nombreuses expériences, que ça soit à Medellín, que ça soit Détroit …
Étienne Klein : Un tour du monde pour voir comment les grandes villes s’organisent …
Bruno Maquart : Pour voir comment les initiatives citoyennes, petites ou grandes, permettent à la ville d’évoluer et aux citoyens de peser sur le devenir de son environnement urbain. Pour nous, c’est une manière très importante de parler de sciences aussi.
Étienne Klein : Qu’est-ce que vous pouvez faire à Paris, par exemple, qui changerait la vie des Parisiens ?
Bruno Maquart : Écoutez, ce qui pourrait changer la vie des Parisiens, c’est fermer totalement Paris à la circulation.
Étienne Klein : Il y a des villes où c’est comme ça ?
Bruno Maquart : Il y a des villes où c’est comme ça. Il y a des villes, - quand on les construit de zéro, c’est beaucoup plus simple - où on pense évidemment les circulations à partir de ce qu’on sait aujourd’hui. Je pense que la difficulté qu’à une ville comme Paris, comme toute les grandes métropoles, c’est de passer un modèle à l’autre, les chemins sont multiples et ils sont tous en pente.
[Insert bruits de circulations en ville]
Étienne Klein : Axe : « Chemins de traverse, la science où on ne l’attend pas »
Bruno Maquart : Là aussi, c’est une marque de fabrique de la maison, et une conviction assez profonde. Si vous permettez, je vais faire une toute digression. Le département de prospective du ministère de la Culture vient de faire paraître une étude assez passionnante sur les représentations des Français face à la culture : qu’est-ce que pour vous la culture et qu’est-ce qui n’est pas la culture ? Ils ont posé des questions « est-ce que ceci ; est-ce que cela, c’est de la culture ? » La science arrive en deuxième position, 77% des Français estiment que la science, c’est de la culture, juste après la visite d’un musée ou d’un monument, et bien avant le fait d’écouter de la musique, de dire la presse …
Étienne Klein : D’aller au concert ?
Bruno Maquart : … d’aller au concert ou bien au cinéma, ça …
Étienne Klein : La science est devant le cinéma ?
Bruno Maquart : … la science est très loin devant le cinéma …
Étienne Klein : la science est très loin devant le cinéma, je ne peux pas le croire …
Bruno Maquart : Là aussi, c’est une marque de fabrique de la maison, et une conviction assez profonde. Si vous permettez, je vais faire une toute digression. Le département de prospective du ministère de la Culture vient de faire paraître une étude assez passionnante sur les représentations des Français face à la culture : « qu’est-ce que pour vous la culture et qu’est-ce qui n’est pas la culture ? » Ils ont posé des questions « est-ce que ceci ; est-ce que cela, c’est de la culture ? » La science arrive en deuxième position, 77% des Français estiment que la science, c’est de la culture, juste après la visite d’un musée ou d’un monument, et bien avant le fait d’écouter de la musique, de dire la presse …
Étienne Klein : D’aller au concert ?
Bruno Maquart : … d’aller au concert ou bien au cinéma, ça …
Étienne Klein : La science est devant le cinéma ?
Bruno Maquart : … la science est très loin devant le cinéma …
Étienne Klein : la science est très loin devant le cinéma, je ne peux pas le croire …
Bruno Maquart : La science est très loin devant le cinéma. Et ça, c’est un résultat, qui pour nous est capital, parce que ça vient conforter notre intuition depuis le départ, c’est que la science à beaucoup à voir …
Étienne Klein : Il va falloir faire des films de sciences pour sauver le cinéma …
Bruno Maquart : On en fait, d’ailleurs pendant la Fête de la science, dans quelques jours, on fait un festival qui va s’appeler « Science en vues » [12], avec 58 documentaires qui ont été financés par les investissements d’avenir, dans le cadre de bourses sur la science.
Étienne Klein : Universcience fait des films …
Bruno Maquart : Universcience fait des films, Universcience gère une plate-forme universcience.tv, qui a plus de 3 millions de vues par an, qui, avec une petite trentaine de contributeurs, est la première plate-forme en langue française de diffusion multimédia scientifiques. C’est un instrument essentiel dans le monde d’aujourd’hui de la diffusion de la science, nous avons une audience qui croit de 20% par an.
Étienne Klein : Revenons aux « Chemins de traverse, la science où on ne l’attend pas » …
Bruno Maquart : Alors, c’est attraper la science, j’allais dire, par des sujets qui a priori ne sont pas des suggestions scientifiques. La saison prochaine, nous allons montrer une exposition sur les effets spéciaux [13], c’est du cinéma puisque vous en parliez. Mais derrière les effets spéciaux, il y a de la technique, il y a de la science, comment on amène à parler de science en convoquant d’autres champs disciplinaires, d’autres champs culturels, que ce soit le cinéma, les arts plastiques … Nous allons relancer une politique de dialogue avec les arts, qui soient pas les arts qui viennent illustrer un propos scientifique, mais qui nous permettront, je l’espère, de montrer, et ça c’est une des choses auxquelles je tiens beaucoup, que le génie de l’homme est un, et que les scientifiques sont des créateurs, et que nous devons les considérer comme tels, et que nous avons beaucoup à gagner, que ce soit le public ou les institutions, à les mettre ensemble, à faire dialoguer des artistes et des scientifiques, parce que ce sont des cousins, finalement. Pour la première fois depuis très longtemps, Universcience a passé commande à un artiste vivant. Il va réaliser une œuvre à la Cité des Sciences et de l’Industrie, qui va occuper le couloir qui va relier la Cité des sourcils industries avec la zone de commerce, qui va ouvrir, juste à côté de nous [14]. Par ailleurs, au Palais de la Découverte, qui est dans le Grand Palais, comme chacun sait, mais au bout du Grand Palais, on est séparé par une porte, qui est fermée depuis très longtemps, une porte devenue très symbolique, nous allons ouvrir cette porte à l’occasion de la FIAC, la Foire internationale d’art contemporain, en octobre, puisque la FIAC est et nous avons décidé de de nous parler, de faire du Palais de la Découverte à un endroit de la FIAC hors les murs, où vont se dérouler des performances d’artistes, en particulier au planétarium, d’un artiste [15] avec un de nos médiateurs …
Étienne Klein : Cela sera quand, Bruno Maquart ?
Bruno Maquart : La FIAC, c’est du 20 au 24 octobre 2016, c’est tout bientôt. J’invite tout le monde à y venir, parce que …
Étienne Klein : Je voudrais vous interroger sur une exposition prévue, qui s’appelle « Quoi de neuf au Moyen-Âge ? » [16] ?
Bruno Maquart : Tout à fait ! Elle commence dans quelques jours.
Étienne Klein : J’ai appris des noms de sciences que je ne connaissais pas, en lisant le document : La palynologie …
Bruno Maquart : Les pollens [17] …
Étienne Klein : L’anthracologie [18] …
Bruno Maquart : Les charbons …
Étienne Klein : Qu’est-ce que va montrer ces expositions ? Qu’au Moyen Âge il s’est passé beaucoup de choses ?
Bruno Maquart : Moyen Âge, c’est 1000 ans d’histoire, qui s’intercalent entre les premiers temps de l’humanité et la vraie naissance et l’humanité, qu’était la Renaissance, donc entre l’Antiquité et sa redécouverte à la Renaissance, nous aurions traversé une période de guerre, de famine moyenne, finalement peu intéressante. Nous allons à la redécouverte de cette période, qui est en fait très intéressante, à plusieurs titres. Comment on le fait ? En utilisant, en convoquant, en employant les découvertes faites par les archéologues, en particulier ceux qui travaillent en archéologie préventive. C’est une manifestation qui est coproduite avec l’Institut national de recherche archéologique préventive, les gens qui font les fouilles quand on fait une autoroute ou un grand équipement commercial …
Étienne Klein : Qui retardent les travaux … ?
Bruno Maquart : … qui vous permettent de sauvegarder ce qui doit l’être. 20 ans de découverte aujourd’hui permettent de relire le Moyen Âge et de donner à penser que c’est une période où beaucoup de ce que nous vivons aujourd’hui ont été inventées en fait.
Étienne Klein : Par exemple ?
Bruno Maquart : Les banlieues, les lunettes ont été inventées au Moyen Âge, les boutons ont été inventés en Moyen Âge, beaucoup de choses, de petites choses et de grandes choses de la vie quotidienne, et c’est un temps de mutations économiques, culturelles, religieuses absolument considérables. 1000 ans, c’est long. Donc, nous faisons ça à partir d’objets, mais là aussi en développant ce que nous savons faire, c’est-à-dire des manips, puisque les gens pourront expérimenter avec leurs mains, de la manière la plus attractive possible, un certain nombre de choses que je ne dévoile pas, parce qu’il faut donner évidemment aux gens le désir de venir …
Étienne Klein : Rappelez-nous quand démarre cette exposition sur le Moyen Âge.
Bruno Maquart : Quoi de neuf au Moyen-Âge ? démarre le 11 octobre 2016, et elle courra jusqu’au 06 août 2017.
Étienne Klein : Juste après la Fête de la Science
Bruno Maquart : Juste après la Fête de la Science.
Étienne Klein : Qu’est-ce que c’est que pour vous la Fête de la science ? Là encore, un anniversaire. C’est un anniversaire tous les ans, puisqu’elle a lieu tous les ans, mais là, c’est le 25ème anniversaire de la Fête de la science
Bruno Maquart : C’est le 25ème anniversaire de la Fête de la science, en fait nous allons célébrer un anniversaire multiple. La Fête de la science, c’est un moment de grande joie, puisque toute la maison, sur nos deux sites, est totalement gratuites sur trois jours.
Étienne Klein : Trois jours gratuits.
Bruno Maquart : Trois jours totalement gratuits, où il y a de la science du sol au plafond, et beaucoup de choses qui viennent là pour l’occasion. Pour les 25 ans, l’ensemble les organismes de recherche nous font l’honneur de venir à la Cité des Sciences et de l’Industrie. Nous allons avoir le festival Science en vues de films scientifiques dont je parlais tout à l’heure, en collaboration [19] avec le festival, bien établi, qu’est Pariscience, organisé par le Muséum national d’histoire naturelle, et un nombre important d’associations qui travaillent dans le secteur, qui viennent avec des propositions plus intéressantes les unes que les autres.
La Fête de la science, c’est le moyen de tester la popularité de nos établissements mais aussi l’intérêt de la science. L’année dernière, nous avons rouvert la Cité des sciences, après l’incendie, pour la Fête de la science. Sur les deux sites, on a eu 63000 visiteurs en trois jours. 63000 visiteurs, c’est la population de Quimper, c’est l’équivalent d’une ville moyenne, qui pousse la porte en un week-end de nos deux établissements. Quand on dit que la science n’intéresse pas, je me permets de penser le contraire.
Étienne Klein : Vous dites que la mission d’Universcience, c’est de : « diffuser la culture scientifique, technique et industrielle, partout, quelle que soit la situation géographique des personnes concernées », comment est-ce que vous créez des relations avec la province, avec l’étranger ? Comment est-ce que vous sortez de Paris en fait ?
Bruno Maquart : La France a la chance d’être dotée d’un réseau de Centre de culture scientifique et technique particulièrement dynamiques. Allez à Toulouse, allez à Rennes, allez à Bordeaux, allez à Strasbourg, dans de plus petites villes, le Cheylard en Ardèche, vous trouvez sur l’ensemble du territoire une cinquantaine de Centres de sciences très dynamiques, très inventifs, et qui attirent beaucoup de publics. Bordeaux, Cap Sciences, qui vient de fêter ses 20 ans, c’est l’institution culturelle qui attire le plus de visiteurs sur la ville.
Étienne Klein : C’est l’Espace des sciences de Rennes …
Bruno Maquart : L’Espace des sciences de Rennes, le Muséum national d’histoire naturelle de Toulouse, les muséums sont nos cousins, ils ont des collections, ce sont aussi de grands pourvoyeurs de culture scientifiques. Le Muséum de Toulouse attire plus de visiteurs que la totalité des musées de Toulouse. Bref, je pourrais multiplier à l’infini les exemples, on riche de …
Étienne Klein : Ce sont des chiffres qui m’étonnent, mais que je me réjouis d’entendre, que la science attire plus que beaucoup d’autres choses, ce n’est pas le discours qu’on entend d’habitude …
Bruno Maquart : Ce n’est pas le discours que l’on entend, je pense que nous avons à travailler collectivement une meilleure visibilité de nos maisons, on attire, bon an mal an, entre 10 et 15 millions de personnes par an dans nos murs, c’est considérable. Nous sommes un gigantesque musée du quotidien, les uns et les autres, de Lille à Marseille, et ces endroits inventent, chacun une des manières de faire différente. Ce qui me frappe, c’est que ce que vous trouvez à Caen, avec un nouvel équipement qui vient d’ouvrir, absolument fantastique, la Maison de l’innovation, ne ressemble pas à ce que vous trouvez à Villeneuve-d’Ascq, par exemple, ni à ce que vous trouvez à Chambéry, mais chacun a …
Étienne Klein : Il y a des effets de culture et de géographie dans la façon présenter la science ?
Bruno Maquart : Il y a des effets d’écosystèmes. Les écosystèmes régionaux sont différents. Les rapports avec l’Université, avec le monde de l’entreprise, avec les autres équipements culturels, avec le monde associatif sont différents. Et ça, cela donne à chaque fois quelque chose d’unique, en tout cas, à chaque fois de particulièrement sympathique. Alors, Universcience travaille avec ces collègues sur une base, j’allais dire, volontaire, et nous avons des collaborations. On réfléchit ensemble, par exemple, il y a un groupe de travail qui fonctionne depuis plusieurs années sur la médiation numérique, nous coproduisons des expositions. Avec nos amis de Rennes, on va coproduire une exposition sur la ligne à grande vitesse, « Les mains dans le cambouis », ou bien nous allons ensemble monter des formations, nous avons en particulier lancé une École de la médiation, qui est un une petite structure qui vise à former les médiateurs en sciences. Nous pensons que la culture scientifique, c’est aussi un métier, qu’il faut le professionnaliser. Nous avons de l’expérience les uns et les autres maintenant. Hubert Curien, était le grand …
Étienne Klein : Le grand initiateur de la Fête de la science …
Bruno Maquart : … C’est lui qui a donné l’élan à la culture scientifique, comme elle est aujourd’hui. S’il voyait ce qu’elle est, il y aura lieu d’être fier aujourd’hui. Nous sommes dans une phase où nous devons, je pense, gagner en visibilité institutionnelle, et travailler à consolider nos savoir-faire, que ça soit en France ou à l’étranger, parce qu’à l’étranger Universcience a la taille critique pour se déployer hors de nos frontières. Nous sommes une institution d’État, financée par l’État, donc nous servons aussi d’instruments de diplomatie à l’étranger, et nous sommes en lien très étroit avec l’Institut français, qui regroupe sur l’ensemble du globe la représentation culturelle et scientifiques de notre pays. Par exemple, au moment de la COP21, nous avons mis à disposition de l’Institut français, une exposition sur le climat, une exposition qui était toute en fichiers numériques, pas du tout chère à faire circuler, qui a été montré dans 20 pays à travers le monde. Ça, c’est pour nous très important. Nous vendons aussi des expositions à l’étranger, de plus en plus sont les coproduisons. L’exposition sur la ville, dont je parlais tout à l’heure, est coproduite avec le musée des sciences de Singapour. Par ailleurs, nous développons l’export de notre savoir-faire, l’ingénierie. Nous avons des partenaires, j’allais dire, presque sur l’ensemble des continents, en tout cas sur ceux dans lesquels les pays qui se développent se tournent vers la culture scientifique. Il y en a en Amérique du Sud, il y en a dans le monde des pays du Golf, il y en a évidemment dans tout le monde asiatique et chinois, en particulier. Donc, je suis beaucoup à l’étranger pour …
Étienne Klein : Est-ce qu’Universcience est copié à l’étranger ? Est-ce qu’il y a des gens qui s’inspirent directement de ce que vous avez fait, pour concevoir des musées de sciences et de techniques ? Ou, est-ce qu’à chaque fois on tombe sur des biais culturels qui font que ce qui est présenté est assez différent ?
Bruno Maquart : C’est à la fois vrai et à la fois faux, on retrouve des choses que nous avons pu inventer, qui sont digérées par d’autres, transformées. Finalement, nous formons aussi une grande famille mondiale, tout le monde se connaît, peu ou prou, il y a une émulation qui est assez saine, qui fait que, par exemple avec Hong Kong, qui a un musée de science extrêmement dynamique, qui attire beaucoup de monde, en particulier des enfants, nous travaillons souvent avec eux, autour de la Cité des enfants, ils reprennent des choses de chez nous, mais ils les adaptent, les mettent dans un autre contexte. Bref, la relation est étroite, et elle est dans les deux sens d’ailleurs, nous avons beaucoup à apprendre de ce qui se fait de ce qui se fait à l’étranger, puisque, Dieu soit loué, il y a des musées qui ouvrent tous les jours ; le musée des sciences et des techniques de Montréal va rouvrir fin 2017, évidemment il va rouvrir avec une proposition totalement renouvelée. C’est un musée à collection, avec des locomotives, des avions, il va marier les technologies numériques, la réalité augmentée, avec ses collections, de manière assez spectaculaire. Nous irons tous à Montréal pour voir ce qu’ils ont fait, parce qu’encore une fois, chacun apporte sa pierre à l’édifice commun, mais nous partageons des valeurs, qui sont celles d’Universcience, qui sont l’ouverture, l’universalité, dont je parlais tout à l’heure, et l’innovation. Nous sommes des établissements OUI (Ouverture, universalité, innovation).
[Insert séquence musicale]
Étienne Klein : Bruno Maquart, vous projetez également de faire des festivals. Qu’est-ce que c’est un festival pour Universcience ?
Bruno Maquart : C’est un moment, assez ramassé dans le temps, en général c’est sur un week-end, vendredi samedi dimanche. Souvent, le vendredi, c’est pour les scolaires, samedi et dimanche, c’est pour les individuels et les familles, qui sont un temps fort autour d’une thématique, qui permet d’offrir au public des propositions à tous les étages de la maison, que cela soit sous forme de démonstrations dedans ou dehors, que ça soit sous forme de film, d’exposer … Bref, c’est un moment d’effervescence pour nous, et qui vient utilement compléter nos offres, qui sont des offres d’expositions permanentes ou temporaires, ou nos offre de conférences, ou bien à la Cité des enfants ou bien au Fab Lab. Alors, ça permet, ça a une vertu aussi importante à nos yeux, c’est qu’il faut deux ans pour faire une exposition, il faut six mois pour faire un festival, ce qui veut dire qu’on peut plus facilement capter un sujet …
Étienne Klein : Improviser …
Bruno Maquart : Oui, et à être peut-être plus réactifs par rapport à nos envies. Ce sont des formats plus exigeants à la fois, et aussi plus légers, qui ont trouvé à se concrétiser au printemps dernier, avec un festival sur les drones. On a été les premiers à Paris à faire un festival « Drôle de drone » [20], comme il a marché, il y aura une deuxième édition l’année prochaine.
Étienne Klein : Quel était le public ? C’étaient des jeunes plutôt ou cela intéresse toutes les générations ?
Bruno Maquart : Il y avait beaucoup de jeunes, parce qu’il y avait des courses de drones, parce qu’on a fait venir cette espèce de génie bricoleur, un Canadien incroyable, qui s’appelle Alexandre Duru, qui a inventé le hoverboard, la planche à roulettes qui vole au lieu d’avoir des roulettes. Il a fait des démonstrations, c’était la première fois en Europe, bien sûr.
Étienne Klein : Il a volé sur sa planche ?
Bruno Maquart : Il a volé au-dessus des bassins de la Cité des Sciences et de l’Industrie, et ma foi, ça s’était un grand moment, parce que la Cité des Sciences et de l’Industrie finalement c’est une gigantesque vitrine, c’est un endroit où les gens doivent venir voir les choses pour la première fois. On veut être l’endroit où les choses se voient, et où les gens ont un rapport, j’allais dire, facile avec les choses, avec les idées, avec les gens, parce que dans nos festivals, on fait aussi venir des scientifiques, des industriels, qui parlent au public. Il y a, par exemple, une petite société française [21], qui a développé une méthode pour reconstituer en 3D les ruines de Palmyre, qui est venue pour non seulement projeter ces images mais aussi pour expliquer comment elle travaille. C’est une manière de parler de scientifique et de technique très vivante, et le succès nous a conduit à programmer cette deuxième édition l’année prochaine. On va le faire, là, au mois de décembre sur l’alimentation du futur, qu’est-ce qu’on va trouver dans nos assiettes dans 30 ans ?
Étienne Klein : Quand j’étais adolescent, on parlait de l’alimentation en l’an 2000, c’étaient des comprimés, des tubes, des pastilles.
Bruno Maquart : Et voilà ! En fait, ce n’est pas ça ! Demain, il va y avoir beaucoup d’autres choses, les algues vont jouer un grand rôle va, semblablement ; l’agriculture revient en ville, pour un tas de raisons, c’est d’ailleurs pour ça qu’on a installé – cela a été un petit clin d’œil – deux moutons sur le parvis de la Cité des sciences et de l’industries, qui montrent qu’aujourd’hui on peut utiliser les animaux de la ferme sur en ville, parce que c’est plus écologique que les tondeuses …
Étienne Klein : Cela fait moins de bruit …
Bruno Maquart : Cela fait moins de bruit, et ce programme animaux de la ferme va connaître de nouveaux développements l’année prochaine. Alors, un festival sur les drones, un festival sur l’alimentation, un festival sur les nouveaux moyens de déplacement, on fêtera le printemps, l’année prochaine, avec un festival « Roue libre » [22], du vélo au Skateboard, en passant par les nouveaux objets de déplacements individuels, beaucoup de choses se passent, et nous voulons les montrer, les faire essayer par le public, et toujours parler de la science derrière, de là où la société aujourd’hui, de là où elle peut aller demain. Nous sommes un peu des éclaireurs du futur aussi. On n’a pas la science infuse, en tout cas, nous ne détenons pas la vérité, mais nous souhaitons donner aux gens des moyens de se faire une opinion, en tout cas d’aiguiser leur curiosité, que cela soit une curiosité de spécialiste ou une curiosité d’honnête homme.
Étienne Klein : Merci Bruno Maquart, d’être venu à cette conversation scientifique. Vous nous avez donné les 1000 et une raison d’aller à la Cité des sciences et au Palais de la Découverte.
C’était La conversation scientifique par Étienne Klein, avec la collaboration de Cyril Beart, à la technique Édouard Rubinstein, et à la réalisation François Caunac.