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L’Appel des appels, une radiographie du malaise social

France Culture, le Magazine de la rédaction, « l’Appel des appels », une radiographie du malaise social, émission du 21 mars 2009, durée 18 minutes, rediffusée le dimanche 16 août 2009.

Présentation sur le site de France Culture : Deux jours après une grande journée de manifestation intersyndicale et à la veille d’un nouveau rendez-vous de « l’Appel des appels », nous avons choisi d’analyser le malaise social qui couve dans diverses branches, de l’éducation à la santé en passant par la justice, la culture ou encore l’information.

« l’Appel des appels », lancé en décembre dernier par Roland Gori dénonce les conséquences sociales de réformes hâtivement mises en place, et la souffrance qui s’accroît.

Ses comités et ses militants se retrouvent demain à Montreuil pour une nouvelle journée de débats et de réflexion.

« l’Appel des appels », une radiographie du malaise social, un magazine de Marie-Pierre Vérot. Avec Francis Pascal à la technique.

Annonce de l’émission en fin de journal de la mi-journée le dimanche 16 août par Véronique Pellerin.

Bonjour. Malaise social, l’expression a beaucoup été employée au cours de cette année. À cause de la crise, bien sûr, mais en premier lieu en raison du train de réformes mises en place par le gouvernement et qui a touché de nombreuses branches : éducation, justice, santé, culture ou encore, information. Roland Gori a voulu se pencher sur ce malaise social, conséquence de réformes rapidement mises en place, en lançant « l’Appel des appels ». En mars dernier, Marie-Pierre Vérot a accompagné ces militants dans une de leurs réunions-débats. « l’Appel des appels », radioscopie du malaise social. Je vous propose donc de réécouter son magazine.

Message de Maryse Legrand, psychologue clinicienne, qui a réalisé cette transcription :
Dans la mesure du possible j’ai tenté de rendre compte de l’oralité des propos par le mot à mot et la ponctuation. Les points d’interrogation, mis entre parenthèses, signalent mes hésitations sur un mot, ou groupe de mots, sur l’orthographe d’un nom propre. Pour tout complément que vous seriez en mesure d’apporter à cet écrit ou pour toute erreur d’interprétation ou d’orthographe que vous pourriez relever lors de votre lecture, merci de me contacter : maryselegrand[ate]orange[point]fr

Le Magazine de la rédaction du 21 mars 2009

Roland Gori : J’ai signé la pétition bien sûr « Sauvons la Recherche », « Sauvons l’Université », « Sauvons l’hôpital », « Sauvons les RASED ». Enfin, on n’arrête pas de sauver, alors bon, finalement, toutes ces pétitions elles sont quand même le signe, l’indice, le symptôme de malaises profonds dans notre société actuelle. Je dirais même, elles sont plutôt les symptômes d’une maladie de civilisation.

Marie-Pierre Vérot : Roland Gori, psychanalyste, universitaire et initiateur de « l’Appel des appels », pose un diagnostic sombre. Une maladie de civilisation ? Le malaise est en tout cas très présent dans le corps des enseignants-chercheurs par exemple. Cela fait des semaines que dans toute la France ils défilent pour dénoncer des réformes vues comme autant de menaces sur la recherche et l’éducation. Des manifestations festives, souvent inventives, toujours provocatrices.

[…Extraits sonores…]

Ce jeudi 26 février, à Rouen, les chercheurs ont organisé une procession des concepts inutiles qu’ils traînent dans les rues comme autant de boulets.

Une manifestante : Comme concept inutile, le raisonnement logique, on n’a pas l’impression que ce soit très à la mode en ce moment dans le gouvernement. L’informatique fondamentale, la recherche fondamentale. Ça apparaît inutile. La formation des enseignants par exemple : concept inutile d’après Xavier Darcos.

Marie-Pierre Vérot : « La phénoménologie, l’herméneutique, la relativité générale, la théorie des groupes, l’astronomie, l’éthique, les mathématiques fondamentales », ils vont les brûler en place publique, non loin de l’emplacement du bûcher de Jeanne d’Arc, au terme d’un procès expéditif. Auparavant, le cortège s’était arrêté en plein carrefour et chacun de sortir de sa poche un livre qu’il aime bien pour le déclamer en plein air.

[…Extraits sonores… ]

Les automobilistes s’arrêtent, s’approchent, écoutent. Pas de coups de klaxon énervés. Juste une pause, gratuite. Gratuite mais précieuse et même très utile estime Roland Gori.

Roland Gori : La ville ne doit pas simplement obéir au principe d’utilité. Ce sont des pauses respiratoires. C’est essentiel. C’est comme l’oxygène la poésie, voyez, c’est-à-dire que si vous privez le corps humain de l’oxygène ben finalement vous le tuez. Ben si vous privez finalement la cité, si vous privez la culture et la civilisation, de cet oxygène que constitue la parole, de cet oxygène que constitue la poésie… enfin, alors, qu’est-ce que ça veut dire ? Il faut avoir simplement… on a comme toute lecture, les modes d’emploi ? C’est-à-dire c’est ça ? C’est-à-dire que notre culture doit être une culture du mode d’emploi ?

Marie-Pierre Vérot : C’est contre cette culture du mode d’emploi, si l’on veut résumer la démarche, qu’est né « l’Appel des appels ». Il rassemble les craintes de maintes professions qui se sont retrouvées à l’automne dernier en proie au même malaise : médecins, psychiatres, chercheurs, enseignants, magistrats, journalistes, gens de culture, tous se disent étouffés par des réformes qui, au nom de la rentabilité, détruisent sentent-ils, le cœur de leurs métiers et leur part d’humanité. À quelques jours de Noël, Roland Gori croit entendre dans ces souffrances un même appel : « Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, attirons l’attention des Pouvoirs Publics et de l’opinion sur les conséquences sociales désastreuses des Réformes hâtivement mises en place ces derniers temps. » - Lecture à plusieurs voix de la première phrase du texte « l’Appel des appels ».

Le 22 décembre dernier, il publie un texte intitulé « l’Appel des appels ». Très vite il rencontre un succès foudroyant sur le Net : 1000, 2000, 10 000, 50 000, plus de 72 000 signatures aujourd’hui.

Ce soir, nous sommes dans le salon de Roland Gori à Marseille. Il a réuni autour de la table une poignée de signataires passionnés, impliqués.

Benoît Andermasen ( ?), je suis magistrat, délégué du syndicat de la magistrature au TGI d’Aix.

Pascale Giravalli, je suis psychiatre et je travaille en milieu pénitentiaire à la prison des Baumettes depuis très longtemps.

Christian Bonnet, je suis psychologue clinicien.

Anne Alix, cinéaste.

Patrick Bensoussan, je suis psychiatre et je travaille dans un centre de lutte contre le cancer à Marseille.

Marie-José Del Volgo, je suis donc enseignant-chercheur depuis plus de 30 ans.

Roland Gori : Finalement, si vous prenez le milieu de l’information que vous connaissez bien, si vous prenez le milieu de la justice, si vous prenez le milieu de la culture, si vous prenez le milieu de la médecine, le milieu du soin psychique, le milieu de la prévention, le milieu de l’éducation, le milieu de la recherche, de l’enseignement supérieur, on a l’impression que ce que l’on tend à nous imposer c’est une conception managériale qui définit finalement une culture des résultats avec des idéaux de concurrence, de compétition, de performance, de profit à court terme, de rentabilité.

Pascale Giravalli : Effectivement, on va dire, si on est dans les chiffres, moi lorsque j’ai pu prendre le temps d’une demi-heure à trois-quarts par patient, par consultation, je suis assez contente de mon travail, c’est-à-dire que j’ai l’impression que j’ai fait du bon travail. Pour, on va dire, alors on va dire la machine administrative, c’est pas du tout rentable et ils préfèrent que j’aie vu 25 patients dans l’après-midi. Pour l’hôpital c’est beaucoup plus rentable, voilà !

Benoît Andermasen ( ?) : Je vais juste vous donner une anecdote. Elle est de la semaine dernière mais ces interviews, ces réunions, depuis deux ans on les ferait toutes les semaines, toutes les semaines j’aurais une autre anecdote à raconter, parce que toutes les semaines on a une Chancellerie qui nous sort quelque chose et là on reçoit des instructions de la Chancellerie sur la visioconférence. On nous demande – alors la visioconférence c’est un outil, c’est un outil, on n’est pas contre le progrès, ça peut être intéressant, c’est vrai qu’on va parfois faire extraire quelqu’un qui est en Guyane pour lui notifier un… je vais dire, je sais pas moi, un supplément d’information sur un point de détail, ça peut avoir un intérêt, c’est pas obligatoire et indispensable d’organiser son transfèrement parce que ça a un coût très important donc l’outil peut être utile et il peut être adapté à la situation. Mais là, on a des instructions très précises qui nous sont de demander de diminuer de 5% les extractions l’année prochaine dans toutes les juridictions, donc, on doit réaliser les objectifs de nombre de visioconférences qu’on va réaliser : 5 % par an, 5 % déjà de plus en 2010. Enfin tout est annoncé, si on n’y arrive pas on va diminuer nos crédits alors qu’on est déjà complètement exsangues au niveau des crédits dans l’institution judiciaire. Et on est en train de concevoir, après avoir supprimé la moitié des juridictions, une justice du futur qui va être purement virtuelle, où tout va se faire par écran, il faut… on nous demande maintenant, les juges d’application des peines, de ne plus aller en Maisons d’arrêt pour aller rencontrer… mais de faire par écran et de… enfin, y a une espèce d’accélération technique et dont de la rentabilité qui met à mal complètement, le cœur du métier qui est le nôtre.

Roland Gori : On est dans quelque chose qui est une pure logique du chiffre et une logique du chiffre dont on se dit – et là, je dirais peut-être des choses un peu différentes de Benoît aussi – que on n’est même pas sûrs que ce soit rentable… c’est-à-dire que pour moi, c’est pas du tout…. ça peut être même contreproductif sur un plan économique et je crois que ça c’est notre point de force de dire « Vous nous faites incorporer des valeurs qui sont des valeurs d’asservissement idéologique mais dont rien ne garantit que à terme, elles s’avèreront… elles seront rentables… »

Pascale Giravalli : Il y a une avalanche de législations qui sont une machine à neutraliser et éliminer les populations, je crois qu’on peut le dire comme ça, avec la loi de prévention de la récidive et qui nous empêche au quotidien, dans le travail. Pour moi le plus caricatural ça a été l’histoire des fichiers ADN, c’est-à-dire que le discours qui était passé dans les médias, c’était « Ne vous inquiétez pas, c’est que pour les dangereux pédophiles violeurs d’enfants », or en fait, pas du tout ! C’est pour tout le monde. Et les choses s’étendent. La question du suivi socio-judiciaire et de l’obligation de soin chez les auteurs de violences sexuelles, ça a été un premier verrou qui est tombé et ça a été étendu pour tout le monde. Donc, on a l’impression aussi que le… je pensais à ça quand vous parliez de la visioconférence, c’est que l’exception est en train de devenir la règle. Et ça c’est dramatique, c’est-à-dire que, effectivement, de l’autre côté, l’histoire de la visioconférence c’est une déshumanisation de la relation hein, c‘est-à-dire que, à partir d’un cas particulier, on va en faire une règle générale.

Roland Gori : Et ce qui est en train de se produire et là, la phrase de Pascale est quand même très inquiétante parce que, Pascale, quand tu dis par exemple, aujourd’hui l’exception devient la règle, c’est une phrase de Walter Benjamin qui est reprise par Giorgio Agamben à propos justement du moment où la culture s’installe dans quelque chose qui est juste avant le nazisme. Donc, on pourrait demain, avoir quelque chose qui y ressemble, qui ne serait pas du côté de l’extermination mais qui serait du côté de l’extermination de l’humain en nous. Est-ce qu’on ne risque pas de tomber dans une espèce de totalitarisme mou ? Je veux dire, on pourrait n’est-ce pas, avec l’écriture néolibérale, quelque chose qui, à un moment donné dans notre histoire s’est inscrit avec l’alphabet, je dirais, du totalitarisme. C’est pas la même culture, ce n’est pas les mêmes valeurs, ce n’est pas la même civilisation mais là, y a quelque chose à quoi les uns et les autres nous pensons mais que nous avons à mettre au travail.

Christian Bonnet : Y a aussi quelque chose. Orwell dans son 1984 parle de la novlangue. La novlangue c’est-à-dire un nouveau langage qui contribue à forger des nouveaux concepts pour ne pas penser. Mettre en place des catégories de vocabulaire, pour, effectivement, ne pas nommer un certain nombre de choses. De choses comme la liberté, de choses comme le risque, de choses comme l’ambivalence, comme la transgression, enfin comme des éléments extrêmement complexes. Vers quoi on va ? Est-ce qu’effectivement il n’y a pas quelque chose de l’ordre de l’établissement de la novlangue, de ce nouveau langage opératoire, épuré, très, très onctueux dans ses formes liées aux statistiques, c’est-à-dire vers une langue qui abstrait l’humain du sens qu’il voudrait mettre dans le monde ?

Marie-José Del Volgo : Juste une petite anecdote par rapport à ça. Y avait un reportage à la télé sur les maisons de retraite et je pense que c’était la directrice qui en parlait, quoi, la difficulté de trouver des places dans les maisons de retraite et elle parlait de « la difficile gestion des stocks ». Voilà, ça parle bien du problème, voilà, quand on sait que les stocks c’est ben voilà, les vieux, ça fait un peu peur quoi !

Christian Bonnet : Le stock, c’est ça de la novlangue. C’est ça la novlangue. C’est pas quelque chose qui est un pur appareil idéologique ourdi dans je ne sais quelle arrière-cour hein, de la part de malades. C’est, effectivement, c’est ça, c’est un vocabulaire insidieux, c’est une idéologie mais qui a des effets très concrets, très précis, très pragmatiques.

[…Pause musicale…]

Marie-Pierre Vérot : Mais où nous entraînent donc tous ces concepts ? Il ne faudrait pas y perdre les souffrances qui ont nourri l’Appel, dans lesquelles il puise d’ailleurs sa légitimité et qui hante Patrick Bensoussan.

Patrick Bensoussan : Je me sentais aller dans le sens du poil à gratter de plus en plus, dans le cadre de cette conversation de salon. On cite Agamben, on cite Foucault, on se renvoie à l’histoire anthropologique, ontologique du monde etc. Je crois que c’est aussi axé sur de la clinique du quotidien, des éléments très factuels de nos rencontres très humaines avec nos enfants, avec nos voisins, avec les malades qu’on traite, avec les gens qu’on rencontre dans nos salles de spectacles etc. et ce qui ouvre sur tout un horizon qui est souvent très, très promu à la relégation aujourd’hui, hein. Y a vraiment des zones entières de population qui sont dans ce champ-là de l’extra-territorialité. Qui peut aller au théâtre aujourd’hui ? Qui se retrouve à l’hôpital auprès des meilleurs spécialistes quand on disait que la France était le témoin de la médecine d’avant-garde, la plus ouverte et potentiellement en tout cas, celle qui se situait dans le champ de l’excellence ? Donc, on voit de plus en plus qu’on est dans des champs de fracture sociale où il y aurait une espèce d’intelligentsia qu’on va taxer comme étant de gauche, démocrate, bien pensante etc., qui pourrait faire salon et refaire le monde. Je crois que le propos c’est pas du tout ça, hein. C’est bien au contraire de se dire que c’est parce qu’on s’enrichit de ce quotidien-là et que ce quotidien-là, y en a marre. Y en a marre pour tous ces gens qui sont tous les besogneux du petit matin, tous les besogneux du soir, tous ceux qui prennent le métro à longueur de temps, tous ceux qui sont collés devant leur télé pour regarder les histoires de distraction de Coca Cola et autres et que… et il faut aussi parler de cette place-là pour tout le monde. Vraiment il me semblait qu’il y a… il faut aussi entendre ce mouvement, et cette exaspération pour être dans l’euphémisme, dans quelque chose qui va très loin, monte de très loin et touche beaucoup, beaucoup de monde. La question de l’Appel ça dit bien son nom, enfin, c’est… il faut que tout le monde se sente appelé.

Marie-Pierre Vérot (s’adressant aux participants) : Vous vous voyez comme quoi alors ? Vous vous dites vous êtes l’avant-garde d’une conscience éclairée ? Vous êtes l’élite en fait qui…

Marie-José Del Volgo : Ben je crois que oui, il faut réfléchir à ça, parce qu’on a parlé de l’autre mais comment l’autre va nous entendre et nous percevoir parce que si on nous perçoit comme des repoussoirs effectivement, gauchistes, intellos, etc.,… je suis sûre qu’on va pas avancer d’un pouce.

Roland Gori : Justement, ces clivages-là, ces cloisonnements-là, moi j’en ai franchement ras-le-bol. S’il faut rester entre universitaires, j’ai mon association, s’il faut rester entre psychanalystes, j’ai mon association. Ce qui me paraît important c’est quelque chose de transversal ou qu’on puisse sur de nouvelles bases échanger entre nous. Là je crois qu’il y a un véritable défi et qu’il faut surtout nous méfier de ne pas peut-être, adopter malgré nous, les valeurs de l’adversaire dans la manière dont luttons contre lui.

[…Extraits sonores sur fond musical…]

Marie-Pierre Vérot : Il y a donc ce qu’il ne faut pas faire. Mais dans le fond, que faire ? Passer à l’action ? À l’action dans la rue ? Interpeler les politiques ? Être un contre-pouvoir ? Une mesure étalon de l’utilité des réformes ? Un thermomètre du malaise social voire sociétal ? L’Appel doit-il simplement dénoncer la maladie de civilisation, en décrire les symptômes ou aussi élaborer un protocole de soin, voire, se faire le médecin de tous nos maux ? En somme, vers où le mouvement doit-il aller ?

Marie-José Del Volgo : Pour moi la finalité de « l’Appel des appels » et de ce qui se passe actuellement, parce que c’est un mouvement beaucoup plus… ça serait effectivement qu’on puisse tous descendre dans la rue mais au sens envahir et dire non et pouvoir après repenser les choses et repenser les… dans tous les champs oui, ça serait ça… effectivement, que ça puisse envahir un peu tout. Mais je crois qu’on a vraiment enfin… le devoir de parler pour les gens qui peuvent pas parler quoi hein, enfin… qui peuvent pas dire.

Christian Bonnet : Ce qui peut nous rassembler par rapport à « l’Appel des appels », c’est aussi l’idée que y a peut-être un format original, peu expérimenté, peu utilisé jusqu’ici qui peut effectivement naître. Quelque chose entre un grand mouvement et des petits mouvements locaux, des groupes, des gens qui, comme nous autour d’une table se rencontrent, peuvent échanger et peuvent dire où ils en sont dans leur travail, comment est-ce qu’ils pratiquent et ce qu’ils peuvent effectivement se proposer. On n’en a pas encore la clé. Y en a peut-être la silhouette. On en a peut-être le contour mais on n’en a peut-être pas encore le… en tout cas moi je n’ai pas l’impression d’en avoir le mode… le mode opératoire. Je suis pas sûr effectivement qu’il corresponde à quelque chose qu’on a déjà connu au sens des modes de rassemblement idéologique autour d’organes structurés et en même temps, donc, du coup, voilà, ça laisse suspendu quelque chose, ça laisse suspendu, en attente.

Roland Gori : Qu’est-ce que va être le mouvement ? Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous dire. Le mouvement est une émergence, on va voir ce qu’il devient. Pour ma part, pour l’instant, ça me convient. Peut-être qu’un jour ça ne me conviendra plus, selon l’allure que prendrait si vous voulez, ce mouvement, encore une fois pour moi, il ne doit pas se substituer aux partis, il ne doit pas se substituer aux syndicats. Il doit constituer une espèce de matière à penser, de matière à agir qui peut servir aux politiques, qui peut servir encore une fois, aux syndicats. Personnellement, vous parlez de légitimité, pour moi c’est celle de réhabiliter celle du citoyen, c’est-à-dire que nous sommes dans un déficit de la démocratie. Je crois que c’est pour ça que les gens… vous ne pouvez pas vous imaginer le 31 janvier, combien les gens souhaitaient prendre la parole. Vous ne pouvez pas vous imaginer combien à l’heure actuelle on reçoit sans cesse des appels, des mails etc. de gens qui demandent à pouvoir prendre la parole, c’est-à-dire je crois qu’il y a véritablement... nous avons souffert d’une carence, si vous voulez, de parole.

« Nous professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice... » (Lecture collective du texte de « l’Appel des appels »)



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