Régis BURNET : Bonjour et merci nous retrouver pour La foi prise au mot, votre rendez-vous de formation chrétienne. Cette semaine un mot : orgueil. En l’entendant vous allez certainement lever les yeux au ciel en vous disant que vous l’avez assez entendue, cette morale à la petite semaine, qui nous disait qu’il ne fallait pas être trop content de soi et qu’il fallait rester humble. En réalité l’orgueil ne va-t-il pas bien plus loin que cela ? Penser que l’on est meilleur que tout le reste n’est-ce pas la meilleure manière de se fermer à l’autre et donc de refuser toutes les valeurs autres que les siennes ? Et du coup, n’est-ce pas la porte ouverte à toutes les erreurs d’appréciation, tous les racismes, toutes les intolérances ? Et dans le domaine spirituel, n’est-ce pas la meilleure manière que de se mettre dans la position de Dieu ? Bien plus qu’un péché individuel, n’est-ce pas un péché de civilisation, celui de notre modernité ? Bref, vous le voyez, il est urgent de s’intéresser à l’orgueil et je vais le faire en compagnie de mes deux invités : Laurence DEVILLAIRS, bonsoir !
Laurence DEVILLAIRS : Bonsoir.
Régis BURNET : Vous êtes philosophe, maître de conférences à l’Institut catholique de Paris, et je suis très heureux de vous retrouver, parce que vous êtes venue très souvent dans cette émission, et c’est toujours un plaisir …
Laurence DEVILLAIRS : C’est réciproque.
Régis BURNET : Merci beaucoup.
Axel FOUQUET, vous, c’est votre toute première, bonsoir !
Axel FOUQUET : Bonsoir.
Régis BURNET : Vous êtes philosophe, en fait vous êtes jeune doctorant, vous préparez un doctorat sur Saint-Augustin. Quel est le titre de votre doctorat ?
Axel FOUQUET : L’épreuve du temps chez Saint-Augustin. Un sujet bien connu du temps, je vais essayer d’apporter quelque chose d’un peu nouveau.
Régis BURNET : C’est ce que l’on vous souhaite. Merci beaucoup d’être là en tous cas.
Pour commencer, peut-être un peu de définitions. Quelle serait la définition que vous donneriez l’un et l’autre de l’orgueil, que l’on appelait autrefois la superbe ?
Laurence DEVILLAIRS : Je pense, si vous me le permettez, à Descartes, qui a une bonne définition. L’orgueil, c’est se croire la cause d’événements qui surviennent alors qu’on n’y est pour rien. Je pense que cela rejoint ce que vous disiez, que l’orgueil c’est un défaut de perception et de connaissance, c’est à dire qu’on se croit à la source du meilleur, d’une certaine façon, et le glissement se fait : « c’est moi qui l’ait fait » …, du « moi, je », on passe à un orgueil envers sa propre personne, qui est une illusion en réalité, on se prête des qualités, une superbe qu’on n’a pas.
Régis BURNET : Et vous, comment définirez-vous l’orgueil ?
Axel FOUQUET : En tant qu’Augustinien, j’insisterais peut-être plutôt sur la dimension d’amour, ce qui est peut-être même au fondement de ce biais cognitif. Je pense qu’on peut distinguer l’orgueil des autres péchés. La plupart des autres péchés portent sur des objets différents ou sur des régions du moi des parties de notre action. L’orgueil est peut-être le seul péché qui a pour objet le sujet lui-même, ce qui le rend d’ailleurs difficile à repérer, parce que c’est une sorte d’angle mort de l’existence, qui est le soi. Cela définirait, selon Augustin, l’appétit d’une grandeur perverse, le désir d’une grandeur perverse. C’est une sorte d’amour de soi déréglée.
Régis BURNET : Vous placez le débat sur le domaine antique, en grec il y avait deux mots qui peut-être peuvent nous aider à préciser ce que vous dites, l’un et l’autre : tuphos, une sorte de fumée qui monte au cerveau, et hybris, une sorte de démesure violente. Est-ce qu’il faut les opposer ? Ou est-ce la même chose ?
Axel FOUQUET : L’hybris s’insère dans le mode de pensée antique qui est un mode de pensée cosmique, c’est-à-dire qu’il y a un ordre du monde, une harmonie, une mesure. L’hybris désigne plutôt un acte, qui par sa démesure risque de causer le désordre, c’est-à-dire une sorte de rupture dans l’ordre du monde. Donc vraiment, l’hybris c’est plutôt un acte cosmique, on va dire, c’est assez extérieur. C’est par exemple un homme qui essaie d’atteindre la demeure des dieux. Il y a de l’orgueil dedans mais ce qui fait vraiment l’hybris c’est plutôt l’acte lui-même. Alors que l’orgueil consiste plutôt dans un rapport de soi à soi, c’est quelque chose de plutôt intérieure, du rapport de l’amour à lui-même. C’est pour ça qu’il me semble que l’orgueil est plus fondamental que l’hybris. L’orgueil peut mener à l’hybris mais est quand même différent de l’hybris, tant que c’est vraiment quelque chose d’intérieur.
Laurence DEVILLAIRS : Il y a cette idée quand même que l’orgueil c’est une matrice. En termes théologiques, …
Régis BURNET : La mère de tous les péchés …
Laurence DEVILLAIRS : … il va se distribuer dans les autres péchés, jusqu’à la gourmandise. Je pense à un texte magnifique de La Bruyère, qui décrit l’orgueilleux, c’est « Gnathon », comment il le décrit ? Il est avide, il va jusqu’à manger votre propre plat, de toute façon il ne vous voit pas … Vous voyez, il y a une avidité à se nourrir soi-même. Donc, c’est le péché des péchés et la matrice, et puis dans un langage plus philosophique ou morale, l’amour-propre est aussi aux fondements de la colère, … En fait, c’est la matrice de tous les désordres, parce que c’est un rapport à soi qui est faussé. Le rapport aux autres, le rapport au monde va être faussé.
Régis BURNET : Vous êtes d’accord avec l’idée que cela part d’une sorte d’erreur d’appréciation ? Pour citer un immortel philosophe qui s’appelait Michel AUDIARD : « Les imbéciles ça osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît »
Laurence DEVILLAIRS : Il y a ça aussi chez Thomas d’Aquin … Je pense qu’il y a les deux. Encore une fois, les Grecs avaient raison. Il y a l’hybris, le fait de ne pas être à sa place, et ça rejoint la définition que donnera Descartes, c’est finalement ne pas se connaître. L’orgueil est tout sauf une connaissance de soi, on a l’impression que c’est une manifestation de soi alors qu’en fait c’est une ignorance de soi. Il y a l’hybris qui consiste à s’accorder beaucoup trop, démesurément, et il y a aussi quand même l’idée de cette fumée. L’orgueil, c’est la rencontre entre deux contradictoires : c’est un trop plein de soi, qui est en fait une méconnaissance de soi, et c’est un rien. C’est le trop plein et le rien, parce qu’en réalité ce dont on s’enorgueillit, ce n’est rien puisque cela ne peut pas m’être imputé, c’est quelque chose que je m’impute de façon complètement illusoire. Donc, il y a quand même les deux : il y a le rien et le trop plein.
Axel FOUQUET : Pour rebondir peut-être sur cette idée, Augustin a une pensée qui intéressante. En effet, l’amour est placé en nous pour être destiné à aimer un être infini. Et l’orgueil qu’est-ce que c’est ? C’est ce moment où l’amour qui est destiné à un être infini décide de faire sécession et de se porter sur lui-même, c’est-à-dire d’aimer un être fini. Il y a cette idée de vide, cet amour est trop gros pour ce que je suis, ce qui explique après le débordement de l’orgueilleux dans toutes ses manifestations extérieures, qui sont comme « Gnathon » une façon d’essayer de se remplir. Augustin ne dirait pas le vide, puisqu’on ne le savait pas à son époque, mais plutôt son néant, on essaie de remplir son néant, parce que cet amour destiné à l’infini se reportait sur un être trop petit pour lui.
Laurence DEVILLAIRS : C’est une passion triste, d’une certaine façon. Il y a quelque chose de fondamentalement triste dans l’orgueil parce que, comme le disait Axel FOUQUET, on est capable de beaucoup. On est capable d’un amour très grand, et en fait c’est comme si on était à la fois encombré, embarrassé de cet amour, dont on est capable, puis on va le porter sur des objets ridicules en réalité, …
Régis BURNET : Qui ne valent pas la peine …
Laurence DEVILLAIRS : … ridiculement petits, ça va être - on va dépasser complètement notre époque, l’Antiquité et pour moi le XVIIe siècle - ma voiture, mon chien … Ça, c’est Hume par exemple, ce philosophe anglais du XVIIIe, qui l’analyse très, très bien. Il va dire qu’en fait l’orgueil est un tel trop-plein, est une telle perception, faussée certes, mais une perception du monde que ça va se loger même sur ma région. Peut-être que chauvinisme c’est une forme d’orgueil en réalité. Donc cela va se loger sur pleins d’objets ridiculement dérisoires par rapport à cet amour immense dont nous sommes capables.
Régis BURNET : Le contraire de l’orgueil c’est quoi ? Est-ce que c’est l’humilité, comme on le dit souvent ?
Axel FOUQUET : Moi, je penserais que oui, cela serait en effet l’humilité, parce que si l’orgueil c’est avoir un amour de soi beaucoup trop grand par rapport à ce qu’on est réellement, l’humilité consiste non pas à se voir plus petit qu’on est, on se voit plus petit qu’on n’est pas ce qu’on est orgueilleux à la base, on sent qu’on doit se rabaisser, mais à se connaître tel qu’on est. L’humilité, c’est se connaître tel qu’on est et s’aimer à sa juste mesure. Donc, oui, cela serait bien l’humilité. C’est ce qui permet d’ailleurs ici de redifférencier d’une autre façon l’hybris où le contraire de l’hybris serait plutôt disons la justice ou la tempérance, cela ne serait pas l’humilité.
Régis BURNET : Vous dites : à la base on est orgueilleux, c’est une déclaration personnelle que vous êtes en train de nous faire, ou cela vaut pour tous les êtres humains ?
Axel FOUQUET : L’humilité est vécue comme un abaissement parce que l’homme en général a tendance à se voir plus grand qu’il n’est, c’est pour cela qu’on parle d’abaissement, on a l’impression qu’on est ramené à plus petit que ce qu’on est réellement, mais c’est parce qu’à la base on se voyait beaucoup plus grand qu’on est. Mais l’humilité consiste simplement à faire vérité en soi, faire vérité et à se voir à la mesure où l’on est réellement.
Laurence DEVILLAIRS : Pensons à l’expression contemporaine, je crois que c’est l’expression qui a effacé l’orgueil, elle est pleine d’ambiguïtés, c’est le narcissisme. Je crois que l’on ne dit presque plus orgueil, …
Régis BURNET : Non, non, on en parlait avant l’émission, qu’est-ce qu’on dit ?
Laurence DEVILLAIRS : On ne l’entend presque plus, cela a déserté notre vocabulaire moral. Je pense qu’on parle de narcissisme. Il y a l’effet de la psychanalyse bien sûr, qui avait envahi notre vocabulaire, mais il y a l’ambiguïté de ce terme et l’ambiguïté de notre rapport à l’amour propre aussi. Il ne faut pas manquer de narcissisme, c’est comme le cholestérol, il y a un bon narcissisme et un mauvais narcissisme, le mauvais narcissisme c’est l’orgueil. C’est précisément mal placer son orgueil. Je crois que de nos jours on dirait ça. On dirait l’orgueil mal placé, et là c’est un narcissisme qui dérange les autres. En réalité il est négatif parce qu’il offusque les autres. Mais, il y a une forme de bon narcissisme de nos jours, qui est alors l’orgueil bien placé, qui est devenu l’amour propre, parce que manquer d’amour propre, c’est comme se manquer à soi-même, c’est comme faire défaut à soi-même. Je crois qu’il y a eu un glissement très intéressant. Il n’est pas négatif totalement.
Régis BURNET : En vous écoutant, l’expression qui serait peut-être la plus contemporaine est de se dire « il se la raconte » ou il est « mytho », mythomane, l’idée qu’il y a un récit sur soi qui n’est pas ajusté, il y a quelque chose qui ne va pas.
Laurence DEVILLAIRS : Absolument ! Ou alors « il ne s’est pas vu », « il ne se voit pas », il y a l’idée de nécessité de se raconter des histoires. Et ça, je crois que dans le siècle qui est le mien, au XVIIe, on a vraiment cette idée. On l’a dans « Les caractères » de La bruyères, dans La Rochefoucauld, c’est que l’orgueilleux, c’est la définition que j’ai donnée avec Descartes, il se la raconte. Il croit qu’il est plus qu’il n’est. Il y a cette idée aussi étymologique qu’on se fait des films. On vit d’une illusion sur soi qui est en réalité un mensonge. Alors, toute la question, et je ne cesse de me la poser, c’est : est-ce que ce mensonge à soi est volontaire ou est-ce qu’on finit par habiter son orgueil ? C’est-à-dire qu’on finit par être davantage la personne que je crois être par mon orgueil plutôt que la personne que je suis vraiment. Je crois qu’à un moment donné on finit par adhérer à ce mensonge de celui que je crois être …
Régis BURNET : Vous voulez dire que c’est une sorte de mécanisme de protection à l’origine et on finit par croire à ses propres mensonges …
Laurence DEVILLAIRS : Je pense qu’on finit par être plus souvent celui qu’on n’est pas que celui qu’on est, parce que, Axel le disait, il y a une blessure d’amour propre, qui est d’accepter d’être uniquement celui que je suis. Et celui que je suis est sujet à plein de défauts. Je crois qu’il y a une consolation dans l’orgueil, à être meilleur que je ne suis, cet être que je ne suis pas mais que j’imagine et que je voudrais que les autres imaginent que je suis. Je pense que finalement c’est plus facile.
Axel FOUQUET : Ce qui est intéressant, pour revenir sur cette histoire de « se la raconter », paradoxalement, peut-être que celui qui est réellement et puissamment orgueilleux sera celui qui se fera des films sur lui-même mais qui ne se racontera pas, parce que la vanité c’est déjà une sorte de premier échec de l’orgueil. Celui qui est vraiment orgueilleux et qui s’aime, qui se voit beaucoup plus haut qu’il n’est, et qui arrive véritablement à s’aimer dans la hauteur qu’il croit avoir, il n’a pas besoin d’avoir l’assentiment des autres.
Régis BURNET : C’est vrai …
Axel FOUQUET : Il n’a pas besoin non plus de chercher à dominer les autres, c’est pour ça que la vanité, ou ce qu’on appelle par exemple la libido dominandi, la volonté de dominer, on les prend souvent pour des manifestations d’orgueil alors ce sont précisément des manifestations de la faiblesse de l’orgueil. On s’imagine Dieu, on est bien conscient qu’on ne l’est pas, on cherche à se voir Dieu dans le regard des autres, cela s’appelle la vanité, ou bien arracher cette reconnaissance par la domination. Donc, vanité ou libido dominandi ce sont déjà des échecs d’orgueil. Précisément, celui qui se la raconte, ne se la raconte pas forcément aux autres, s’il est vraiment orgueilleux.
Régis BURNET : Donc, c’est un aveu de faiblesse. C’est intéressant ce que vous dites. Paradoxalement, les gens qui veulent dominer sont les plus –moi, je suis convaincu là-dessus, puis des années de vie universitaire, vous verrez, ça nous en convainc assez vite - sont souvent une preuve de …
Axel FOUQUET : c’est une fuite en avant. On se désir la source absolue de toute chose et le législateur de ce monde. Or, on le sait bien, je pense vraiment que c’est impossible de se mentir à soi-même, totalement, c’est pour ça qu’il y a très peu d’orgueilleux qui restent véritablement eux-mêmes, il y a besoin d’une externalisation pour essayer d’y croire au moins par le regard des autres. Et cela passe en effet par la vanité, la domination, même tous les actes transgressifs, il y a ce beau passage du vol des poires chez Augustin, (Le vol des poires, dans Les Confessions (livre II, chapitre 4) …
Régis BURNET : On va y venir
Axel FOUQUET : … pourquoi il vole les poires ? Au fond, c’est qu’il avait envie de sentir une liberté pure, qu’il fantasmait peut-être lui …
Laurence DEVILLAIRS : Parce qu’il était entouré de son groupe d’amis. Le vol de poires, il ne veut absolument pas de poires, il ne meurt pas de faim, il est entouré. Je ne sais pas si Augustin aurait volé ces poires s’il avait été seul. Le problème de l’orgueil, je suis entièrement d’accord avec votre analyse, l’orgueil ne doute pas. Je pense que l’orgueilleux, vous le disiez, c’est à cela qu’on le reconnaît, il ne doute pas, mais en même temps le fait même qu’il y ait les autres, l’existence même des autres, induit cette mise en scène de soi. Je pense que l’on est conduit à la vanité parce qu’on ne peut pas en rester juste à l’orgueil, cette assurance que j’ai sur moi-même, ma toute puissance, ma beauté, mon intelligence, toutes les qualités dont on se pare, le fait même que d’autres existent fait que cet orgueil doit se médiatiser par leur regard. Il y a une forme de fatalité, comme nous existons avec les autres et sous leurs regards et que nous voulons exister sous leurs regards, eh bien nous allons devoir mettre en scène notre orgueil, nous mettre en scène nous-mêmes. Donc, on n’en a jamais fini d’être un orgueilleux.
Régis BURNET : On n’a jamais fini de « cela raconter ». Alors, je vous propose que l’on fasse une première pause avec le texte qui dans la tradition occidentale, en particulier à cause de votre ami Augustin, a été le texte sur lequel on a fondé cette idée d’orgueil, c’est le fameux texte de la Genèse, chapitre 3, c’est des affaires non pas de poires mais de pommes, en fait de fruits, c’est les versets 1 à 10.
Or le serpent était la plus astucieuse de toutes les bêtes des champs que le Seigneur Dieu avait faites. Il dit à la femme : « Vraiment ! Dieu vous a dit « vous ne mangerez pas de tout arbre du jardin ! » ? … »
La femme répondit au serpent : « Nous pouvons manger du fruit des arbres du jardin. Mais du fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : « Vous n’en mangerez pas et vous n’y toucherez pas afin de ne pas mourir. » »
Le serpent dit à la femme : « Non, vous ne mourrez pas, mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des Dieux possédant la connaissance de ce qui est bon ou mauvais. » »
La femme vit que l’arbre était bon à manger, séduisant à regarder, précieux pour agir avec clairvoyance. Elle en prit un fruit dont elle mangea, elle en donnait aussi à son mari, qui était avec elle, et il en mangea.
Leurs yeux à tous de s’ouvrirent et ils surent qu’ils étaient nus. Ayant cousu des feuilles de figuier, ils s’en firent des pagnes.
Or, ils entendirent la voix du seigneur Dieu qui se promenait dans le jardin au souffle du jour. L’homme et la femme se cachèrent devant le seigneur Dieu au milieu des arbres du jardin.
Le seigneur Dieu appela l’homme et lui dit : « Où es-tu ? » Il répondit : « J’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris peur car j’étais nu, et je me suis caché. »Genèse3, 1-10
Régis BURNET : Axel FOUQUET, une première question : est-ce que c’est vrai pour vous que c’est Augustin qui l’a lu, l’a mal lu, et nous a mis dans le moralisme pendant 1500 ans ?
Axel FOUQUET : Vous vous doutez de ma réponse. Ce qui est intéressant, c’est au contraire tout sauf du moralisme, si on entend par moralisme une sorte de puritanisme qui poserait des sortes de règles abstraites pour limiter l’action. Ce que nous montre Augustin, il n’est pas le seul à lire ici le péché d’orgueil, mais il le commente de façon particulièrement claire, c’est que le premier péché est en effet un péché d’orgueil dans le sens où l’homme s’est voulu comme Dieu. Le moralisme c’est souvent une histoire de concupiscence, Augustin, là encore une fois il n’est pas le seul, à dire que dans le premier péché, c’est le rapport de soi à soi, c’est se voir comme un Dieu. Augustin dit : vouloir être son propre fondement, sa propre stabilité et tout le reste, toutes les conséquences, la concupiscence, suivent après. Mais le péché de base est bien celui de l’orgueil, c’est-à-dire le rapport de soi soit : « Vous serez comme des Dieux », c’est-à-dire être soi-même son propre Dieu et tout le reste n’est que n’est que conséquence. Dire que l’orgueil est au fondement, c’est dire que ce n’est pas du tout le désordre de la chair qui a causé le péché mais c’est plutôt l’inverse, qu’au fond la faute ne vient pas du corps, la faute ne vient pas des objets du monde, mais la faute vient du rapport de soi à soi, d’un rapport qui est faussé.
Régis BURNET : Là aussi c’est une forme d’aveu de faiblesse parce que c’est une manière de dire qu’on est tellement insécurisé dans l’existence qu’on a envie d’être Dieu, on a envie d’un truc qui soit solide, quoi …
Laurence DEVILLAIRS : Oui, c’est le paradoxe fondamental de l’orgueil, c’est à la fois une toute puissance et une terreur, un effroi de n’avoir que soi. Je pense d’ailleurs que la modernité ne consiste pas à se faire soi-même un Dieu, à se constituer en tout puissant, à prendre la place d’un Dieu, au contraire je crois que c’est l’angoissé ou l’effroi terrible de se dire qu’on a que nous-mêmes, que l’homme est abandonné à lui-même, et qu’il n’a que lui sans autres fondements, sans autres terres, sans autre secours que lui-même. Je crois que la modernité, en fait c’est plus une peur, un orgueil comme peur qu’un orgueil comme toute puissance. Donc, effectivement l’orgueil semble essayer de trouver une consolation dans un trop plein, dans une assurance excessive de soi-même, sur un fond qui est l’absence de tranquillité.
Régis BURNET : C’est intéressant ce que vous dites - je vais faire le pont avec ce qu’on avait prévu, dans ce que je vous avais envoyé, quand on a préparé cette émission, de faire à la fin - mais quand on parle du transhumanisme et qu’on dit : oui, c’est l’orgueil de la modernité etc., en fait c’est peut-être une terrible peur de la mort.
Laurence DEVILLAIRS : Je pense. Je pense qu’exister, c’est exister sans armes. Il y a une nudité, puisqu’on parlait de la Genèse, absolue de l’homme, je dirais même une inconsolabilité, qui fait que l’orgueil est une des formes de consolation possible, c’est-à-dire qu’on ne peut pas n’avoir affaire qu’à soi, c’est terrible.
Axel FOUQUET : Ce qui est intéressant, c’est de voir que les grands chantiers de la modernité ou de la postmodernité, comme le transhumanisme ou le scientisme, qu’est-ce sinon essayer de rattraper ces dons premiers de la situation avant le péché, à savoir l’immortalité, l’incorruptibilité du corps, et la science qui nous a été donnée. Pour revenir à saint Augustin, cette idée parodie de tout puissance, il y a cet orgueilleux qui veut devenir immortel, donc le transhumanisme, le scientisme, tout savoir et tout résoudre par la connaissance, cela se veut grand mais au fond il y a quelque chose de parodique qui se manifeste dedans, presque de ridicule, c’est que devant cette sorte de monstration de toute puissance on voit au contraire la petitesse, parce que le transhumanisme, la vie immortelle, dans quelles conditions ?
Régis BURNET : Donc vous diriez, en parodiant un titre très connu, « Le Drame de l’humanisme athée », qu’au fond il y a quelque chose de dramatique, Dieu n’est plus là, dans la conscience moderne, donc on sait plus quoi faire quoi. À la limite on pouvait se dire avant : « Bon, je ne sais pas comment gérer mais Dieu s’en occupera et puis voilà … » et là, on peut plus.
Axel FOUQUET : Là, on se met à le singer. Peut-être que je peux lire maintenant cet extrait d’Augustin, qui vient après la méditation du vol des poires. Augustin cherche pourquoi il a fait cela. Comme vous le disiez tout à l’heure, il n’a pas besoin de ces poires, donc cela l’amène à une réflexion sur le péché comme une sorte d’imitation perverse de Dieu. C’est au Livre 2, paragraphe 13.
Régis BURNET : Vous lisez les « Confessions », ce n’est pas votre Bible, …
Laurence DEVILLAIRS : C’est une forme de Bible.
Régis BURNET : Pour les Augustiniens, c’est une forme de Bible.
Axel FOUQUET : « […] Car l’orgueil lui-même singe d’élévation, alors que toi seul tu es Dieu, élevé au-dessus de tout […] Ils t’imitent, mais de travers, tous ceux qui s’éloignent de toi et se dressent contre toi. Pourtant, même en t’imitant ainsi, ils te désignent comme le créateur de tout être, marquant par-là qu’il n’y a point de lieu où l’on puisse se retirer, pour être de toute façon loin de toi. […] » c’est-à-dire dans l’orgueil, ou ce que vous rappelez « Le Drame de l’humanisme athée », cet orgueil de la modernité qui a perdu son Dieu, au contraire peut-être de cette façon Dieu n’a jamais été aussi présent mais en négatif. Dans cette imitation, ce singe de Dieu, il y a vraiment comme une sorte de signe fait au créateur. « Qu’ai-je donc aimé, moi, dans ce vol, et en quoi, fût-ce défectueusement et de travers, ai-je imité mon Seigneur ? Ai-je pris plaisir à agir contre la loi, ne serait-ce qu’en fraude, parce que je ne pouvais le faire de vive force ? et voulu ainsi, dans ma prison, – ma prison, c’est l’ego qui est absolutisé, c’est l’ego qui n’est plus ouvert sur l’autre et Dieu – imiter une liberté à la manque, en faisant impunément ce qui était interdit, par une ténébreuse parodie de toute-puissance ? […] » Une ténébreuse parodie de toute-puissance, voire repousser la mort, c’est une sorte de fantasme de toute puissance, qui montre que l’homme est fait pour cette grandeur mais quand il veut l’accomplir par lui-même, cela n’aboutit qu’à une parodie.
Régis BURNET : C’est ça, parce qu’en fait le drame, là, pour le coup, chez Augustin, c’est de vouloir être son propre fondement alors qu’en fait il y en a un, il existe, Dieu est là …
Laurence DEVILLAIRS : Et ne pas le trouver en fait, parce que quand on veut être son propre fondement, c’est voué à l’échec puisqu’il y a une fragilité …
Axel FOUQUET : Augustin dit très bien : « tu veux être grand » - il le dit aussi avec la richesse « tu veux être riche » - tu as tout à fait raison – c’est dans un de ses sermons – mais simplement, si tu veux l’être, ne le fait pas en essayant d’être à toi-même ton propre fondement, tu veux être grand, tu veux être riche, la vraie grandeur est dans l’amour de Dieu, tu seras grand en Dieu – Augustin n’en parle pas, mais il y a des (manque un mot incompris) qui se trouvent chez les pères grecs – tu seras riche en Dieu, etc., ton appétit est juste, tu as raison d’avoir cet appétit de grandeur, simplement si tu veux le réussir, moi je vais t’aider à la réussir, je ne te dis pas soit tout petit, si tu veux le réussir soit humble en aimant Dieu, et aime toi, toi-même en Dieu » L’idée de s’aimer soi-même en Dieu.
Laurence DEVILLAIRS : Il y a un appel dans l’orgueil, non ?
Axel FOUQUET : … parce que cet amour, Augustin dit, tu dois l’orienter vers toi, (manque un bout de phrase incompris). En effet cet amour d’infini, cet amour de grandeur, cet amour presque de divinité est presque naturel, c’est un don qui a été mis, mais Dieu l’a mis, pour Augustin, pour que nous allions vers lui, c’est ce qu’il appelle la conversion. Donc, Augustin ne cherche pas à réduire cet amour, simplement à le réorienter. Donc, le contraire de d’orgueil ce n’est pas se flageller, se rouler dans la cendre, se voir tout petit, se haïr, il y a peut-être une différence avec Pascal, il n’y a pas à haïr le soi, au contraire, il faut s’aimer soi-même, mais vraiment, c’est-à-dire en Dieu, dans le fondement, là où nous sommes vraiment grands.
Régis BURNET : C’est la bonne démonstration, vous administrez une démonstration de ce vous disiez, ce n’est pas du tout du moralisme à la petite semaine, comme vous dites, c’est réorienter le désir, ne pas le nier.
Axel FOUQUET : C’est ça, réorienter, simplement la mener vers son lieu où il est naturel. C’est, on peut penser vraiment à des parallèles, par exemple dans le platonisme, le désir qui naît devant la beauté, il ne s’agit pas de le nier parce qu’il serait mauvais, mais simplement de le réorienter. Là, il ne s’agit pas d’orgueil, mais ici, Augustin est vraiment dans cette idée d’au fond, le péché c’est simplement un amour qui a mal aboutit, un amour légitime, qui a mal abouti. Avec l’orgueil qui est le péché des péchés, c’est encore plus vrai.
Régis BURNET : Alors, Pascal ? Il vous a tendu la perche ...
Laurence DEVILLAIRS : D’Augustin à Pascal, c’est une ligne droite.
Régis BURNET : Expliquez pourquoi.
Axel FOUQUET : Il y a de grandes différences je pense.
Laurence DEVILLAIRS : C’est une longue discussion que l’on a avec Axel FOUQUET.
Régis BURNET : Expliquez pourquoi, parce qu’historiquement, Pascal ?
Laurence DEVILLAIRS : Historiquement, tout le XVIIe siècle et augustinien, on le lit, on le découvre, il y a déjà des éditions, donc Augustin devient disponible. Je dirais qu’il a le statut quasiment de l’homme providentiel, parce que tous ceux qui vont vouloir réformer les choses en théologie, mais qui vont vouloir aussi réformer les choses en politique et en philosophie, vont dire : notre autorité, c’est Augustin, parce qu’ils vont pouvoir balayer les anciennes idoles pour en mettre d’autres.
Axel FOUQUET : Comme à tous les siècles.
Régis BURNET : Oui.
Laurence DEVILLAIRS : Oui, mais Augustin en tous cas, c’est l’homme providentiel, intellectuellement il va permettre de changer les choses. Puis, il y a un lieu, en France, qui n’a plus jamais eu d’équivalent quand même, une avant-garde culturelle, parce qu’on les présente souvent comme des réactionnaires, mais c’est tout le contraire, c’est Port Royal, ce qu’on a appelé le jansénisme, qui va rassembler aussi bien des laïcs que des religieuses, qui va lire vraiment Augustin et qui va en faire une autorité au sens plein, c’est-à-dire celui qui a compris, celui qui permet de comprendre. Pascal, qui est proche de Port Royal, va avoir deux idées de génie, entre autres, il en a beaucoup : la première, c’est de rendre la théologie augustinienne accessible, ce qui fait que dans les salons même les femmes pourront en parler …
Régis BURNET : Même les femmes !
Laurence DEVILLAIRS : … archi-accessible.
Régis BURNET : Il y a de l’ironie. Dans ce que vous dites, il y a beaucoup d’ironie.
Laurence DEVILLAIRS : … Oui, il y a de l’ironie. Mais vraiment, Pascal invente un genre de la théologie populaire, dont on peut absolument débattre. Puis, il va faire cette œuvre, qu’il va laisser inachevée, Les « Pensées », pour savoir ce que c’est, on continue d’en parler, où il va, moi je pense qu’il y a plus de philosophie que théologie dans les « Pensées », la théologie est minimale, mais pour le sujet qui nous occupe, il va même inventer quelque chose dans la langue française qui n’existait pas pour dire tout ce qu’on vient de dire, à la fois cet élan désespéré de l’homme qui est irrémédiablement seul et qui aimerait tellement plus qu’il n’est, l’illusion volontaire, le mensonge à soi, il va appeler ça : « Le moi ». Il va substantive le mot, ça n’existe pas dans la langue française. Le moi, c’est quoi ? C’est entre délire et illusion, c’est un fantasme plus qu’une réalité, c’est tout ce que je voudrais être et que je ne suis pas. D’une certaine façon là où Descartes disait : « Je pense donc je suis », c’est-à-dire que chaque fois que je pense, je suis là où je pense, j’existe vraiment, Pascal va dire : chaque fois que je pense, je ne suis pas, parce que je pense celui que je ne suis pas, et quand je suis, je ne suis jamais là où je pense, c’est-à-dire où je devrais me penser moi-même tel que je suis. Je crois que ce qui est intéressant, peut-être que l’une des différences entre Augustin et Pascal, c’est que le XVIIe siècle, et Pascal surtout, introduit le comique dans le drame. Là, on vient de parler d’un drame, cette espèce de désespoir à mal placer son amour, à être laissé à soi-même, et bien, Pascal va à la fois le décrire - je trouve que c’est un coup de génie - et dire à la fois le terrible de notre réalité, et le comique et le ridicule de notre réalité. Il va avoir des fragments où il dit : « je me vois petit, je me veux grand », « je me veux parfait mais je me vois plein défauts », « je veux être aimé de la terre entière et je ne vois rien en moi capable de m’aimer », … Donc, il est rejoint évidemment par toute cette culture du XVIIe, « Les caractères » de La Bruyère, etc., La Fontaine, … Pascal qui décrit ce moi, qui veut être le centre de la terre, qui ne veux surtout pas se voir tel qu’il est, mais la meilleure définition de l’orgueil, je crois que je serais incapable d’en donner une meilleure en réalité, c’est « La grenouille qui veut être plus grosse que le bœuf », « la pécore enfla tellement qu’elle en explosa », parce qu’en fait, et ça je crois que c’est une différence avec la conceptualité de saint-Augustin, c’est que le XVIIe siècle a le concept de vide, le moi c’est une enflure, c’est du vide, c’est une baudruche. Et je veux tellement gonfle, cela en est à la fois dramatique et ridicule, parce que je ne suis jamais assez, c’est un drame, il y a comme une fissure. Je veux tellement m’enfler de rien, de vide, que j’en explose. C’est La Fontaine. Pourquoi j’en explose ? Parce qu’on - on l’a tous vu - n’a pas conscience de notre propre orgueil mais on a conscience de celui des autres, on est bien d’accord …
Régis BURNET : C’est d’ailleurs un des genres de choses agréables dans la vie …
Laurence DEVILLAIRS : … les gens orgueilleux dans la vie, qui se la racontent, qui racontent leurs vies sont sans intérêt. Je pense que ça vous a frappé, non ? En fait, l’orgueil, c’est du bavardage. L’orgueilleux ne dit rien, on a affaire à quelqu’un qui ne nous intéresse pas, tellement il est trop plein de lui-même. Eh bien, la grenouille pleine de vide jusqu’à en exploser, c’est ça. C’est l’insignifiance totale de notre être quand il est orgueilleux. C’est vraiment une faillite totale, parce qu’on veut être absolument intéressant et l’orgueil fait qu’on est totalement insignifiant.
Axel FOUQUET : Cela ne serait pas plutôt dans cas la vanité que l’orgueil, Il y a peut-être une déformation dans le XVIIe siècle due à un glissement d’orgueil à la vanité. L’orgueil, il est tout à fait possible d’imaginer, au risque de dire quelque chose de choquant, que le diable et peut-être quelqu’un d’extrêmement intéressant. Dans la vanité il y a un gonflement en effet, on sent bien que on aime quelque chose qui est un peu vide, donc on essaye de chercher les autres, mais il est tout à fait possible d’imaginer l’orgueilleux, par exemple le sage, retiré sur sa tour d’ivoire, peut être extrêmement intéressant, sans se répandre dans l’extériorité.
Laurence DEVILLAIRS : Je crois que c’est là la raison en est, vous l’avez dit, que l’orgueil comme son fondement est précaire, fragile, la base de l’orgueilleux c’est qu’il n’est pas certain d’exister en réalité, il a besoin d’en passer par la vanité, qui est forcément un échec, vous l’avez parfaitement montré. Le XVIIe siècle montre, la vanité est à la fois ridicule, une sorte de mise en scène du vide, mais comme l’orgueilleux est pris par l’incertitude quant à lui-même, qui est enrobée sous une toute puissance, il a besoin sans cesse qu’on le regarde, qu’on le voit.
Régis BURNET : C’est intéressant, parce qu’on voit bien que l’orgueil ça serait la première étape, la vanité c’est une sorte d’extériorisation de l’orgueil, …
Laurence DEVILLAIRS : Son échec, sa mise en scène, …
Axel FOUQUET : L’orgueil, il me semble que c’est dans le livre « L’Ecclésiastique », « initium peccati », le début du péché, en effet on peut voir toute la suite des péchés, on en parlait tout à l’heure, qui arrive après l’orgueil, comme une sorte de course désespérée pour rattraper cette première faute. Chez Augustin, c’est très présent, cette idée de : il a voulu être son propre fondement, absolutiser son être, or ce qu’il est par lui-même c’est un néant, parce que l’être est un don, évidemment, si l’on se coupe de la source, de ce don, à savoir Dieu, et bien ce qu’on est se délite. Ce n’est pas le vide, mais c’est plutôt le néant, on est plutôt sur un niveau ontologique, et ce délitement ontologique de l’homme qui se coupe de la source, de son être, qui veut être lui-même son propre fondement, abouti à une instabilité. La thématique de la stabilitas est très forte chez Augustin. En effet, il y a cette dispersion après. Augustin utilise le terme de « defauction » (orthographe incertaine), l’idée de s’écouler. On veut être soi-même sa propre source, on finit par s’écouler.
Laurence DEVILLAIRS : Une perte de soi en fait.
Axel FOUQUET : C’est vrai qu’Augustin le pense en termes ontologiques. Au font se couper de la source de son être, voire soi-même son propre être, c’est laisser le néant grignoter en soi. C’est un des paradoxes, l’orgueilleux se veut très grand, il se veut soi en Dieu, comme il n’a pas la puissance de l’être, il finit asservi à plus bas que lui. Il n’a pas voulu servir plus haut que lui, il finit asservi à plus bas que lui. Et ça, c’est une idée qui sera prise en compte.
Régis BURNET : Et ça, on peut le dire, vous preniez un exemple, je n’ai rien contre l’industrie automobile, c’est être asservi à sa voiture ou être asservi des choses qui au fond…
Laurence DEVILLAIRS : Oui, parce que j’ai besoin de preuves de moi-même. Je pense que ce qui manque quand on est coupé de la source, c’est quand même la condition de l’homme, l’homme c’est un être qui est séparé et ce dont il est séparé continue à le faire souffrir. Donc l’orgueil se greffe là-dessus, ce qui va manquer, c’est l’élection. C’est l’idée de : « qui sera là pour m’aimer ? » Et ça, Pascal l’a vu. Il a un grand fragment, qu’il appelle : « Qu’est-ce que le moi ? », où il renverse complètement les choses. Il ne va pas parler en termes d’être, de qui je suis, etc. Il va dire : « mais, est-ce qu’on m’aime ? », « est-ce qu’on m’aime, moi ? », parce que c’est ça quand on a perdu, appelons Dieu, quand on a perdu Dieu, on a perdu celui qui de toute façon m’aimait. On a perdu l’élection.
Régis BURNET : L’amour inconditionnel.
Laurence DEVILLAIRS : L’élection : « c’est toi et personne d’autre » Pascal a parfaitement montré cela. Ce qui manque au fond à l’homme, à l’orgueilleux qui en a une pathologie, c’est de se dire : « Oui, on m’aime. », « Je suis aimé. », « Je suis là pour quelque chose. », « On m’a voulu. » Vous voyez, le drame de l’homme qui se dit : « Personne ne m’a voulu »
Régis BURNET : Personne ne m’aime.
Laurence DEVILLAIRS : Et peut-être « personne ne m’aime. » je pense que dans l’orgueil, il y a cette tristesse infinie et cette action quasi désespérée d’essayer de recréer une élection, c’est à dire de se dire : peut-être que personne ne m’aime mais moi en tout cas je m’aime.
Axel FOUQUET : C’est vrai que cal mène souvent à une sorte de perversion, de voir vraiment arracher à l’autre la reconnaissance.
Régis BURNET : On va entendre du Pascal, « Pensées ». Il y a plusieurs éditions de Pascal, je vais donner des numéros, mais il y a d’autres numéros, c’est le numéro 416 et 373 de l’édition Lafuma, je ne vous demanderai pas …
Laurence DEVILLAIRS : Ce n’est pas mon édition …
Régis BURNET : Je ne vous demanderai pas à quoi cela correspond, parce qu’il faut bien comprendre que Pascal, c’est en fait une sorte de fichier, et on essaie de mettre les choses dans un ordre …
Laurence DEVILLAIRS : Oui, « Les pensées », c’est une œuvre posthume, on a essayé de l’ordre.
Régis BURNET : Oui on fait comme on peut.
« La connaissance de Dieu sans celle de sa misère fait l’orgueil. La connaissance de sa misère sans celle de Dieu fait le désespoir. La connaissance de Jésus-Christ fait le milieu, parce que nous y trouvons et dieu et notre misère. Sans ces divines connaissances, qu’ont pu faire les hommes, sinon, ou s’élever dans le sentiment intérieur qui le reste de leur grandeur passée ou s’abattre dans la vue de leurs faiblesses présente ? Car, ne voyons pas la vérité entière, ils n’ont pu arriver une parfaite vertu. Les uns considérant la nature comme incorrompue, les autres comme irréparable, ils n’ont pu fuir ou l’orgueil, ou la paresse, qui sont les deux sources de tous les vices ; puisqu’ils ne peuvent sinon, ou s’y abandonner par lâcheté, ou en sortir par l’orgueil. Car, s’ils connaissaient l’excellence de l’homme ils en ignoraient la corruption ; de sorte qu’ils évitaient bien la paresse, mais il se perdait dans la superbe ; et, s’ils reconnaissaient l’infirmité de la nature, ils en ignoraient la dignité : de sorte qu’ils pouvaient bien éviter la vanité, mais c’était en se précipitant dans le désespoir. »
Blaise Pascal, Pensées
Régis BURNET : En écoutant Michel d’ARGENT, notre comédien qui lit ce texte, vous avez fait : « Eh ouais ! »
Laurence DEVILLAIRS : Eh oui, c’est le désespoir ou la vanité.
Régis BURNET : C’est ça, cela dit exactement ce qu’on a dit jusqu’à présent. En fait, c’est un drame, cette histoire d’orgueil.
Laurence DEVILLAIRS : Et c’est dans le drame comique, parce qu’il est ridicule. La force du XVIIe siècle - qu’on a perdue, parce qu’on a un esprit de sérieux qui est insupportable, de nos jours tout est très, très sérieux - a décrit le drame de façon comique. C’est Molière. Il met en scène cet homme absolument inconsolable, et d’une tristesse infinie, mais on en rit, et on a raison de rire. En réalité l’orgueil, c’est entre vanité et désespoirs, et comme toujours chez Pascal, quand il nous fait croire qu’il y a une alternative, c’est une contradiction, c’est-à-dire qu’on est les deux à la fois. Je pense qu’il y a un effort désespéré de s’aimer soi-même parce qu’on est en quête d’un amour, on est en quête d’exister pour un autre ou les autres, et la solution qu’on a trouvée, qui n’en est absolument pas une, qui est ridicule et pathologique, c’est la vanité, c’est l’orgueil.
Régis BURNET : Et la solution pour Pascal, évidemment il faut le dire, c’est Dieu.
Laurence DEVILLAIRS : La solution, avant Dieu, c’est la conversion, et puis il faut anéantir cet encombrement du moi. Le Moi est vraiment, on l’a vu, insignifiant, bavard et c’est du vide. Donc, en fait, il faut vider le vide, pour pouvoir exister vraiment, et on existera à ce moment-là. On pourra, en existant vraiment, aller à Dieu.
Régis BURNET : Est-ce que c’est encore actuel ? Parce que dans cette dernière partie de l’émission, j’aimerais qu’on on essaie de voir, de dégager les figures actuelles de l’orgueil, à quoi ça ressemble l’orgueil contemporain ? On a déjà parlé des voitures, j’espère qu’on va parler d’autre chose. Est-ce que vous pensez qu’on est dans cette même idée-là ? Le moi est haïssable, ça c’est quelque chose qu’on nous a appris et qui est devenu presque une sorte de « moraline », comme dirait l’autre, ce que j’appelle la morale à la petite semaine.
Laurence DEVILLAIRS : Je crois qu’on est passé dans un autre paradigme. Déjà, on l’a noté, le mot orgueil a quasiment disparu de notre vocabulaire. Je crois qu’on est dans un paradigme beaucoup plus anglo-saxon, qui est : « l’affirmation de soi », « le nourrir son moi », « s’aimer soi-même », « la confiance en soi ». Je crois qu’en fait la confiance en soi, c’est un concept qui vient vraiment des États-Unis, de la culture américaine, Emerson, etc. Je pense que cela ne pouvait pas coexister avec l’humilité - qui est pourtant, je pense, la meilleure des qualités parce que c’est une perception juste de soi-même, du monde et des autres - que ça a remplacé tout ce qu’on vient de dire sur l’orgueil ou l’amour propre. Il faut de nos jours cultiver son jardin, c’est-à-dire cultiver la confiance en soi, il faut s’affirmer, voire performer. On ne cesse d’être évalué d’ailleurs c’est quand même un signe, c’est-à-dire qu’en fait on ne cesse de devoir exister. Je pensais, en pensant cette émission à l’invasion qui est quasi de l’ordre du toc des selfies, c’est à la fois désespéré, parce qu’on a l’impression qu’il faut des preuves permanentes qu’on est là, qu’on existe, devant un tableau de van Gogh, devant les pyramides, etc., on a l’impression qu’il y a une précarité totale où il faudrait sans cesse qu’on me rassure que j’existe bien, et en même temps je pense qu’il y a cette idée que je dois devenir ma propre marque. Je vais très, très loin, mais je pense qu’une des conséquences de cette confiance en soi dans un paradigme anglo-saxon, c’est : je dois être ma propre entreprise, je dois me vendre.
Régis BURNET : Pour vous, l’orgueil actuellement, c’est quoi ?
Axel FOUQUET : Ce qui est intéressant, c’est de voir, peut-être, que dans la modernité il y a une sorte des guerres des egos, des chapelles, telle identité contre telle autre, toujours cette idée de conflits. On peut se demander pourquoi l’orgueil a conduit à cela. Il y a une définition, je voudrais revenir sur Augustin - dans ce qui peut paraître complètement déconnecté en premier abord mais je pense que cela va nous ramener à ça - qui définit aussi l’orgueil comme l’amour de soi au mépris de Dieu. On pourrait se demander quel est le lien de conséquence entre s’aimer soi-même et mépriser, disons Dieux, mais mépriser l’autre, haïr l’autre. On pourrait penser en premier abord qu’on s’aime tellement soi-même qu’on voit tous les autres petits. Je pense qu’il y a peut-être une autre raison, c’est que si l’orgueil c’est un amour deux fois exagéré, c’est une sorte de course à l’ego. Mais, qu’est-ce qu’autrui, si ce n’est un alter ego, donc quelqu’un que l’on imagine être son concurrent dans cette course à l’ego ? C’est pour ça que l’orgueilleux sent bien que pour gonfler son ego, pour gagner cette course à l’ego, il doit absolument faire dominer son ego sur celui d’autrui. Évidemment, Dieu, c’est l’ego au carré, le jeu suprême. Il y a quand même cette idée qu’autrui comme alter ego est toujours une menace à moi-même et que si je m’affirme, si je dois m’aimer moi-même, je dois en même temps haïr l’autre et d’une certaine manière l’écraser. C’est pour ça que toutes les revendications, on va dire, de sa propre identité, etc., qui sont toujours faites de manière à être en concurrence avec les autres, c’est-à-dire qu’il y a toujours une lutte des identités telles qu’elles soient. Et ça, c’est une figure de l’orgueil. Souvent, faire reconnaître son identité va avec une sorte de lutte avec les identités des autres, et c’est une figure de l’orgueil que de considérer que son ego est en lutte avec les autres. Je pense qu’on peut vraiment voir un lien entre cet égoïsme de guerre et l’orgueil.
Régis BURNET : C’est intéressant ce que vous dites parce qu’on voit bien, quand on écoute un peu ce qui se passe justement, les revendications LGBT, les revendications féministes, … il y a la contre-revendication en disant : mais c’est une haine du blanc, une haine de l’hétéro, c’est une aide de …, on voit bien qu’on n’est pas dans une affirmation positive de soi, comme si on écartait un peu les autres pour qu’on ait sa place et que tout le monde soit dans l’harmonie, mais comme vous dit très justement, on est dans : si je ne suis pas ça, je suis autre chose, donc je suis forcément en opposition …
Axel FOUQUET : En conflit, parce qu’il y a l’idée qu’une identité ne peut pas être affirmée sans qu’elle ne soit nécessairement en conflit avec une autre. Et sous ces revendications, qui souvent sont présentées de façon humaniste, de tolérance, il y a parfois, évidemment il faut voir au cas par cas, cette idée de la guerre des egos, et que pour qu’un ego triomphe, il faut absolument qu’il en abatte un autre, parce qu’il ne peut y avoir qu’un seul Dieu. C’est une conséquence, à mon avis, de cette guerre de l’orgueil.
Régis BURNET : Oui. Qu’on nous comprenne bien, ce n’est pas une manière de condamner ces revendications-là, et peut-être de de remettre un peu les pendules à l’heure en question en matière d’injustices, de domination des uns par rapport aux autres, mais ce que vous êtes en train de se dire, c’est que les travers de domination qui étaient dénoncés, on veut les remettre en place en fait, mais à son propre profit.
Axel FOUQUET : C’est vrai, c’est quasiment vrai pour tout acte d’affirmation, c’est une tendance qui est possible, qui est en creux dans tout acte d’affirmation de soi d’une manière, ce n’est pas du tout spécifique à notre époque, même si dans notre époque cela s’est peut-être développé dans tout, partout, ce n’est pas ce pas seulement une partie la société. Je pense que dans cet égoïsme de combat, retenir la cette présence de l’go …
Laurence DEVILLAIRS : Je pense que ça, c’est le maître mot. Le mot égoïste est assez récent dans notre vocabulaire.
Régis BURNET : En est en train d’y arriver.
Laurence DEVILLAIRS : Mais on y arrive. On se demandait : que reste-t-il de l’orgueil de nos jours ? On disait qu’il a quasiment disparu, peut-être des consciences et du vocabulaire, mais le mot qu’on utilise c’est l’égoïsme, parce qu’il dit, ce qui vient d’être dit, c’est-à-dire que peut-être même que toute revendication d’identité et guerrière, c’est-à-dire qu’elle doit se poser en s’opposant. Encore une fois, cela ne condamne pas des revendications absolument légitimes, mais l’idée même d’enfermer le soi dans une identité est guerrier. Encore une fois, si on prend Hobbes, l’idée même que j’existe fait que je suis en réalité avec l’autre et que je trouve que l’autre a plus que moi.
Axel FOUQUET : C’est cela qui est intéressant, c’est qu’on voit l’égoïste comme une fermeture de l’ego sur soi-même, ce qui est absolument vrai, mais ça ne peut pas se faire sans un conflit avec les autres.
Laurence DEVILLAIRS : Absolument, c’est un rapport aux autres.
Axel FOUQUET : Il y a quand même cette idée, que cette fermeture, c’est une fermeture pour faire grandir l’ego, simplement quand il grandit il se confronte à d’autres alter-egos qui sont des menaces à son impérialisme, à l’emprise de son ego. Il faut supprimer la frontière, pour supprimer la frontière à notre ego, qui est l’alter-ego.
Laurence DEVILLAIRS : Je pensais quand même qu’une des solutions qu’on a trouvées, qui me paraît vitale, parce que mon ego surdimensionné va forcément heurter l’ego de l’autre, qui est tout aussi surdimensionné, ce qui peut donner cet état de guerre, vous avez raison, l’égoïsme est forcément une guerre, on a quand même inventé une chose qui a fonctionné pendant des siècles, c’est la civilité …
Régis BURNET : La politesse.
Laurence DEVILLAIRS : Autrement dit la politesse. Qu’est-ce que la politesse ? Quand on dit « l’idéal de l’honnête homme », justement à l’époque de Pascal, c’est l’idée que je ne dois pas incommoder les autres de ma personne. Évidemment, Pascal va s’horrifier de cette solution, qui n’en est pas une, parce qu’il va dire on va recouvrir ce qui a de détestable en nous, mais on va pas extirper le mal à la racine, on va laisser mon égoïsme mais je vais quand même le couvrir, n’empêche qu’avec cette idée que je dis : « après vous », « excusez-moi », « pardon », ou que je m’inquiète du fait que l’autre aussi existe, c’est une manière d’apporter une forme de paix, peut-être un vernis, on dira le vernis de la civilisation, mais une forme de paix à cette guerre des egos. Si on perd la civilité, on perd beaucoup.
Régis BURNET : Et comme disait Alain, le philosophe, on finit par y croire, à son propre mensonge de civilité, c’est-à-dire qu’on finit par …
Laurence DEVILLAIRS : Comme toutes les éducations …
Régis BURNET : Quand on dit : est-ce que vous allez bien, même si on ne va pas bien, on dit qu’on va bien et finalement …
Laurence DEVILLAIRS : … mais on l’a demandé … mais absolument. Je pense que c’est le propre de l’apprentissage, de l’éducation, c’est que ça doit finir par devenir une habitude, c’est-à-dire que même si on a envie d’aller piétiner l’herbe plus verte du voisin, et bien on va se retenir.
Régis BURNET : On arrive à la fin de l’émission, qu’elle serait le conseil que vous donneriez à un égoïste, là, c’était peut-être un premier conseil, ou à un orgueilleux ? Qu’est-ce que vous diriez ? Quel serait le remède ?
Axel FOUQUET : C’est très difficile, parce que par définition l’orgueilleux ou l’égoïste, particulièrement l’orgueilleux, c’est celui qui pense qu’il n’a pas besoin du conseil des autres. Peut-être, comme je le rappelais tout, la réponse augustinienne, qui consiste à dire : « ton orgueil est juste, tu te désires grand, en effet, tu es destiné à la grandeur, tu es destiné à l’infini, à l’éternité, à la déification, un Dieu en puissance, on ne vas peut-être pas aller jusque-là, mais tu as un devenir divin en toi, simplement, je te donne un conseil, si tu veux le réaliser, passe par Dieu, ou passe par l’autre, pour l’orgueilleux qui n’est pas croyant, un rapport à l’autre, comme on disait, qui ne soit pas de conquête plutôt de charité.
Peut-être un petit point, ce qui est intéressant, c’est de voir que le christianisme a quand même donné comme l’inverse de l’orgueil l’humilité mais aussi la charité : « aime ton prochain comme toi-même ». On pourrait dire que c’est une absence de gratuité, il n’y a pas d’amour gratuit du prochain, mais au contraire, dire : « si tu t’aimes énormément, si tu es orgueilleux, aime encore plus ton prochain, ou aime-le au moins à égalité ». Ce commandement est assez intéressant d’avoir bien viser ce rapport d’ego à ego.
Laurence DEVILLAIRS : En tous cas, pas de mortification de soi. Il y a beaucoup de mystiques qui vont même soupçonner que la mortification de soi, c’est encore un orgueil plus perverse, qui va se loger dans le scrupule, dans la fausse modestie, les cadeaux trop grands, l’abnégation, …
Axel FOUQUET : Chez les pères du désert, il y a cette idée que l’humilité, c’est le dernier … Bernanos disait : « … en humilité comme en toute chose, la démesure porte l’orgueil, … » [1], ou quelque chose du genre.
Régis BURNET : Eh bien, voilà, ce sera les bons conseils : un peu de politesse, un peu de charité, et avec ça on se débarrassera … non, justement on ne s’en débarrassera pas, c’est cela qui est intéressant, vous avez bien montré que c’est un drame perpétuel …
Axel FOUQUET : Pour conclure rapidement, Augustin, disait : « va jusqu’au bout et revient vraiment à toi et voit ce qu’il y a vraiment de plus intime que toi-même ».
Régis BURNET : C’est-à-dire ?
Axel FOUQUET : Accomplit jusqu’au bouton retour à soi, ton égoïsme, retourne à ton ego profond, soit un orgueilleux conséquent.
Régis BURNET : Merci beaucoup. Merci de nous avoir fait mieux découvrir ce concept d’orgueil.
Merci de nous avoir suivis. Vous savez que vous pouvez retrouver cette émission sur le site internet de la chaîne www.ktotv.com, et vous pouvez la regarder autant de fois que vous le souhaitez, car c’est gratuit.
On se retrouve la semaine prochaine.